L'Obs

La mode pour tous

par Sophie Fontanel

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Jadis, votre serviteuse détestait les sous-pulls à col roulé. Si on lui avait dit, dans les années 1970, qu’un jour de septembre 2017 elle ramperait sur le sol pour en avoir un, elle vous aurait ri au nez. Faut dire qu’à l’époque, les souspulls à col roulé étaient coupés dans une matière atroce. Si on oubliait de se laver ne serait-ce que pendant une heure, on se mettait à cocotter acide sous les bras, et on n’osait plus jamais lever les bras en l’air, même à un concert des Stones. Les Stones eux-mêmes portaient des sous-pulls, mais eux c’était moins grave s’ils cocottaien­t parce qu’ils étaient célèbres. Ils avaient le droit. Bref, quand ce vêtement est tombé en désuétude, personne ne l’a trop pleuré. Les vintage à 2 euros ne se vendaient pas, même aux frileux. Et ça aurait pu en rester là. On aurait aujourd’hui un monde sans sous-pulls à col roulé, dans l’indifféren­ce générale. Sauf que. La mode remet toujours tout à la mode. C’est pas qu’elle ne se renouvelle pas, c’est au contraire qu’elle a une capacité illimitée à transcende­r ses erreurs, pour en faire du désir. Le sous-pull en photo vient de chez Acne Studios ( j’aime bien ses côtes larges et plates), mais vous en trouverez partout cet automne. D’ailleurs, cet engouement, je le sentais venir (sans lien avec ce que j’ai écrit sur ce qui cocotte). D’abord, dans la popularité sur Instagram d’une photo d’Audrey Hepburn chez le coiffeur avec un sous-pull noir sous une chemise blanche. On est d’accord qu’Audrey Hepburn ne peut pas dauber sous les bras, c’est impossible. Le sien était en mérinos. Ça nous a réconcilié­s avec le volet « odorat » du vêtement. Ensuite, on a commencé à en voir des zippés. Et les trucs de cyclistes sont devenus le nectar de la hype. C’en est plein, portés avec des costumes de ville, dans le dernier défilé Vuitton homme. Enfin, le sous-pull arrive pile au moment où le « jeune », cette entité si mystérieus­e, en a assez de prendre froid. Vous n’ignorez pas que le jeune s’enrhume continuell­ement car il répugne à porter des pulls. Il trouve que ça vous plombe un look. Le sous-pull, qu’on met sous le tee-shirt ou la chemise, c’est un pull sans un être un, c’est comme de la triche. Du coup, ça devient beaucoup plus excitant ! Bref, ce retour inattendu était comme qui dirait programmé. Ce qui va vraiment être une surprise, c’est à quoi on va ressembler tous en sous-pull!

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