L'Obs

L’opinion de Matthieu Croissande­au

- Par MATTHIEU CROISSANDE­AU M. C.

Laurent Wauquiez dit n’importe quoi, il en a fait sa marque de fabrique. Qu’il vente ou qu’il pleuve, le candidat à la présidence des Républicai­ns répète inlassable­ment les mêmes inepties jusqu’à la caricature. Haro sur les chômeurs et ceux qui s’en occupent. Haro sur les étrangers et ceux qui s’en préoccupen­t. Haro sur les élites, l’Europe, l’école, le multicultu­ralisme, ad nauseam, dans ses meetings survoltés.

Et qu’importe si ce nouveau pourfendeu­r de la caste technocrat­ique en est un pur produit, passé par Louis-le-Grand, Normale-Sup, Sciences-Po et l’ENA… Qu’importe aussi si ce dénonciate­ur zélé de l’« assistanat » cumulait jusqu’au mois dernier une carrière politique avec un statut avantageux de maître des requêtes au conseil d’Etat, où il n’avait pas mis les pieds depuis treize ans… Wauquiez, qui grandit jadis en politique à l’ombre d’un humaniste de droite modérée, n’est pas à une hypocrisie ni à un mensonge près quand il s’agit d’exalter ses troupes ou de masquer le vide de sa pensée.

Le président de la région AuvergneRh­ône-Alpes est un symptôme. Celui d’une droite déboussolé­e qui n’a toujours pas compris ce qui lui était arrivé. La droite n’a pas fait l’inventaire de sa défaite. Encore convaincus que la présidenti­elle devait leur revenir, par l’e et mécanique de l’alternance, ses élus ont trouvé en François Fillon un coupable parfait. Ce faisant, ils occultent une réalité : depuis dix ans, la droite n’a rien inventé, rien produit, rien théorisé. Le programme économique qu’elle propose se cantonne à une purge des finances publiques, mais fait l’impasse sur la révolution numérique, l’entreprene­uriat ou le salariat de demain. Son approche de l’Europe, de l’immigratio­n, de la délinquanc­e ou de la lutte contre le terrorisme reste peu ou prou celle que proposait Sarkozy quand il a été élu, puis congédié.

Faute d’idées neuves, la droite se claquemure dans ce qu’elle connaît, et lorgne allègremen­t celles du Front national. Un pari tactique en forme d’erreur stratégiqu­e. N’en déplaise à cette droite devenue borgne, ces valeurs-là n’ont jamais prouvé qu’elles pouvaient fédérer une majorité. La dernière élection présidenti­elle l’a encore démontré… Persuadé qu’une campagne interne se gagne en flattant les plus bas instincts de ses militants, Wauquiez se vautre toutefois dans le « gros rouge qui tache », cher à son mentor Patrick Buisson (voir l’enquête de Maël Thierry p. 40). A court d’arguments contre ce nouveau pouvoir qui mène une politique que la droite n’a jamais osé appliquer, le voilà qui réveille désormais le nauséabond refrain de l’anti-France. Il n’y aurait chez Macron, vendu à la mondialisa­tion selon lui, aucun amour de son pays, mais une haine de la province et un « désert de l’âme »… Où se niche donc celle de Laurent Wauquiez ?

A nos lecteurs : cette semaine, la petite Esther, qui s’épanouit depuis 2014 dans chaque numéro de « l’Obs », se promène à travers les pages de votre magazine pour commenter l’actualité.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France