L'Obs

Le monde des séries

« 13 Reasons Why », harcèlemen­t saison 2

- Par AMANDINE SCHMITT

Dès les premières images, le spectateur est mis en garde : la nouvelle saison de « 13 Reasons Why » commence par un message de prévention contre le harcèlemen­t énoncé par ses acteurs. Et au cas où celui-ci oublierait l’avertissem­ent initial, le générique de fin renvoie vers un site relayant une campagne du ministère de l’Education nationale. Cette fois, Netflix, producteur et diffuseur de cette série où un jeune homme enquête sur le viol et le suicide de la plus belle fille d’un lycée américain à l’aide des cassettes audio qu’elle a laissées, ne veut pas être pris au dépourvu. L’an dernier, aux Etats-Unis, des associatio­ns de parents jugeaient que le programme (qui a généré 3,5 millions de tweets sur les réseaux sociaux et largement séduit les ados français) glorifiait le suicide.

Dans cette deuxième saison, Clay Jensen (Dylan Minnette), le garçon bien sous tous rapports qui fait progresser l’histoire, a un nouveau centre d’intérêt : sa petite amie Skye (Sosie Bacon), jeune fille tatouée, pleine d’esprit et un peu torturée. Mais Clay n’a pas le temps de profiter de la parenthèse sensuelle à laquelle elle l’invite. A Liberty High, personne ne s’est remis du suicide d’Hannah Baker (Katherine Langford). Clay est assailli de questions par ses camarades de classe. Autant dire que l’ambiance est toujours aussi lourde devant les casiers alors que s’ouvre le procès opposant les parents d’Hannah à son établissem­ent.

Si la première saison adaptait intégralem­ent le livre pour adolescent­s de Jay Asher, ses producteur­s ont décidé de diluer encore un peu l’histoire de ces jeunes tourmentés, tout comme « The Handmaid’s Tale » et « Big Little Lies » prolongent pour leur deuxième saison les livres respectifs dont elles s’inspirent. Le contenu des cassettes audio livrées par Hannah aux protagonis­tes ayant largement circulé, c’est au tour de la justice d’en percer les mystères. Ainsi, alors que chaque épisode de la saison 1 se concentrai­t sur un personnage en fonction du numéro de la cassette reçue, la deuxième, elle, se déroule selon leur ordre d’apparition devant la cour. La mécanique est inversée : ce n’est plus Hannah qui formule son avis sur son entourage mais celui-ci qui donne sa vision de la jeune fille. Bien que morte, Katherine Langford apparaît plus que jamais à l’écran, dans presque tous les flash-back et sous la forme du fantôme imaginé par Clay, éclaboussa­nt toujours le récit de sa présence solaire.

Le show, évocation toujours assez crue du harcèlemen­t scolaire, multiplie les arcs narratifs : des Polaroid circulent, laissant entendre que les mêmes faits ont pu frapper une autre génération, les élèves appelés à témoigner subissent des pressions et un conseiller d’éducation se débat pour améliorer la vie scolaire. Assez vite, deux camps s’affrontent : ceux qui veulent coincer l’horrible Bryce Walker (Justin Prentice) et ceux qui le protègent. Bryce, prédateur que son argent et sa réputation mettent à l’abri, représente une sorte de Weinstein à l’échelle du microcosme du lycée. Si l’ensemble sent un peu le réchauffé et le procédé, l’atout principal de « 13 Reasons Why » demeure : un casting rafraîchis­sant de surdoués aptes à faire croire à n’importe quelle aberration scénaristi­que. En tête, Alisha Boe, qui interprète avec intensité Jessica Davis, ex-meilleure amie d’Hannah. Le show colle de près à son parcours de survivor, elle-même ayant subi ce genre de harcèlemen­t et donc apte à livrer un vibrant plaidoyer contre un sexisme plus que jamais d’actualité. C’est assurément elle qui porte le message de fond : #MeToo.

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Justin Prentice dans la peau du violeur, personnage qui a déclenché des réactions ultraviole­ntes sur les réseaux sociaux.

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