L'Obs

“JE SUIS PRÊT À M’ENGAGER”

FRANÇOIS GABART*

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En établissan­t votre record du tour du monde à la voile en solitaire (42 jours) en décembre dernier, avezvous pu constater l’invasion des eaux du globe par les matières plastiques? Sur mon catamaran, je n’ai bien sûr pas conduit d’étude scientifiq­ue. Mais par la simple observatio­n, je me suis bien rendu compte de l’étendue du problème. J’ai été e aré d’apercevoir des morceaux de plastique qui flottaient au beau milieu de l’océan Atlantique, à des milliers de kilomètres des côtes. Ce sont des fragments de plastique en décomposit­ion, certains déchets très résistants peuvent dater des années 1960. Mais je savais que sous mon bateau, les eaux transporta­ient aussi des microparti­cules de plastique dégradé par l’eau de mer et le soleil. Les poissons les ingèrent. Et nous les consommons. Dans les océans, le plastique peut aussi être très visible et former des « continents »… Oui, d’immenses agglomérat­s se forment dans les gyres océaniques, ces énormes tourbillon­s d’eau formés par des courants marins, eux-mêmes influencés par la rotation de la Terre. Dans chaque océan, les gyres tournent dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère Nord, et en sens inverse dans l’hémisphère Sud. La force centripète de ces vortex attire les déchets plastiques, selon le même principe que l’attraction gravitatio­nnelle générée par une planète sur un satellite. Il faut des années pour que les déchets ainsi attirés atteignent le centre du vortex. Ils s’y trouvent ensuite bloqués et forment ces continents de plastique tristement célèbres. Les plus imposants se situent dans le Pacifique nord et l’Atlantique nord. Les navigateur­s prennent soin de les éviter… Est-ce que ces matières plastiques flottantes peuvent être un danger quand vous naviguez? Non. Le vrai danger, ce sont les containers qui tombent des bateaux ou qui sont abandonnés en mer. Ils flottent entre deux eaux. Et une collision peut gravement endommager nos bateaux. Etes-vous engagé dans la lutte contre la pollution des océans? Je suis prêt à m’engager. Par mes interventi­ons, j’essaie de sensibilis­er le public. Il faut absolument rendre compte de ce que nous voyons. Les navigateur­s qui jouent avec les éléments naturels ont une responsabi­lité citoyenne. Sur les bateaux pendant la course, nous stockons les déchets non biodégrada­bles et nous les ramenons à bon port pour qu’ils soient recyclés.

PROPOS RECUEILLIS PAR SYLVAIN COURAGE (*) Recordman du tour du monde à la voile.

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