NOBLESSE OBLIGE
“Les Windsor, une dynastie royale” Dimanche 17h30 France 5
Saga à base d’archives et de témoignages, cette série documentaire en 6 épisodes retrace au pas de charge le roman vrai d’une famille royale aux prises avec des drames intimes et le tourbillon de l’Histoire.
G ame of Thrones » à l’earl grey? « The Crown » en archives? Cette série sur les Windsor, qui débute en 1911 pour s’achever avec le mariage de Meghan et Harry et s’interroge sur la survie de la monarchie après Elisabeth II, est un peu tout ça à la fois. Et même si sa forme (commentaires hachés, redondances, scènes parfois rejouées) peut d’abord inciter à la prudence critique, il n’est pas interdit de se laisser happer par ses documents filmés et ses héros soumis à la violence castratrice des règles dynastiques.
Ici, l’abnégation prévaut : soit on se sacrifie, soit on est sacrifié. Dans les deux épisodes que nous avons pu visionner, les sacrifiés se nomment Edouard et Albert, dit Bertie. Le premier a 17 ans lorsqu’il hérite du titre de prince de Galles – prélude à celui de souverain –, avenir qui l’atterre. La rébellion chez lui ? Une seconde nature : lui interditon de se battre pendant la Grande Guerre (pas question de le voir capturé ou tué) ? Il file à l’anglaise, monte au front sur une moto volée et découvre le sort des soldats ordinaires. Colère paternelle, hausse de sa cote de popularité.
Celle-ci n’offre pas que des désavantages : dans l’Empire (un cinquième de la population mondiale), des soulèvements nationalistes éclatent. George V expédie le loustic à l’étranger pour cimenter la légitimité britannique. Edouard serre tant de mains qu’il n’utilise plus que la gauche (la droite est pleine de bleus). Aux Etats-Unis, ce bambocheur fait fureur. Liaison avec une starlette de Hollywood. Good Lord ! A son retour, le roi l’attend avec, sur son bureau, cette presse qui épie en permanence les Windsor : « Le prince rentre se coucher au petit matin. » Edouard, qui a des convictions, dénonce le mal-logement dans le pays. Le gouvernement voit rouge : se mêler de politique, et puis quoi encore? Il tombe alors raide dingue de Wallis Simpson. Allure à la Diana Vreeland, papesse de « Vogue », Wallis a du chien, mais elle est divorcée. A la mort de George V, une image – puisque tout ici est affaire d’image – reste en travers de la gorge des Britanniques. Derrière une fenêtre, le couple sourit malgré le deuil. La suite de ce soap opera, on la connaît… Pour épouser Wallis, le jeune souverain abdique au bout de 326 jours de règne.
Au profit de son frère Bertie, futur George VI, qui n’en demandait pas tant. Atteint de bégaiements soignés par l’orthophoniste Lionel Logue (cf. « le Discours d’un roi »), il souffre de la comparaison avec son aîné qui, pétri d’ennui, loin de la cour, l’abreuve de conseils plus ou moins éclairés. Son épouse, la reine Elisabeth, communicante avant l’heure, comprend qu’il leur faut consolider leur image publique. Le roi refuse à Wallis le titre de duchesse royale. Au comble de la frustration, Edouard part en Allemagne où Hitler lui déroule le tapis rouge. Dévastateur. Comment reconquérir l’opinion ? Pendant le Blitz, une bombe touche Buckingham : jusque-là hués quand ils se rendaient dans les quartiers en ruines, les Windsor, qui subissent enfin le même sort que le peuple, redorent leur blason.
Mise à contribution dès l’âge de 14 ans pour s’adresser à la nation, la future Elisabeth II convolera bientôt avec Philip de Grèce, neveu de lord Mountbatten, lié à l’Allemagne nazie par le mariage de trois de ses soeurs. Elle confie à son époux, déjà saoulé par les royales vicissitudes, l’organisation de son couronnement contre l’avis de son cabinet. Philip plaide pour une retransmission télévisée en direct : il se bat. Il a raison L’audience atteint un chiffre record. Ce jourlà, pourtant, une journaliste remarque un geste de la benjamine d’Elisabeth : Margaret époussette la veste de Peter Townsend, un divorcé de seize ans son aîné. L’image, toujours. Et une candidate toute désignée au titre de prochaine sacrifiée.