NORMAL PEOPLE
SÉRIE ANGLO-IRLANDAISE DE SALLY ROONEY (2020) Avec Daisy Edgar-Jones, Paul Mescal. Douze épisodes de 30 minutes. DISPONIBLE SUR STARZPLAY À PARTIR DU 16 JUILLET
A l’origine, il y a le phénomène Sally Rooney. La jeune romancière irlandaise a ébloui la scène littéraire avec « Conversations entre amis » et « Normal People », récit initiatique d’un premier amour, du lycée jusqu’à l’université. L’adaptation de ce dernier (pas encore traduit en français) était attendue avec fébrilité par les lecteurs enamourés… Ils ne devraient pas être déçus : c’est Sally Rooney elle-même qui a donné vie à cette version, au côté d’Alice Birch, scénariste britannique à suivre. Toutes deux déploient une partition atmosphérique et épidermique pour faire partager ce que ressentent leurs héros : ou comment l’amour donne sens et corps à tout ce que vivent deux êtres. Evidemment, on tombe irrémédiablement amoureux, à notre tour, de Marianne (Daisy Edgar-Jones) et Connell (Paul Mescal). L’espace d’une chronique entre feux de joie et gouffres vertigineux, on retrouve le style de celle qu’on a surnommée « la Jane Austen de la génération précaire », cette virtuosité à donner accès aux flux de conscience des protagonistes et à rendre tangible ce qui les définit comme individus : l’empreinte de leur inscription sociologique, mais aussi la puissance de leur sensualité. Ici, la vérité des êtres cherche à se faire entendre, sans que la difficulté du processus soit escamotée. Il faudra, à Marianne comme à Connell, se débarrasser des oripeaux de genre et s’émanciper des déterminismes qui sont les leurs pour avoir une chance de se trouver. Réalisée avec une sensibilité exacerbée par Lenny Abrahamson et Hettie MacDonald, « Normal People » fait parfois penser à la très culte « Friday Night Lights », pour cette façon de capter, avec une frontalité émouvante, l’âge des possibles, le temps de l’amour.