RIVER
SÉRIE BRITANNIQUE D’ABI MORGAN (2015) Avec Stellan Skarsgård, Nicola Walker, Lesley Manville, Eddie Marsan. Six épisodes de 60 minutes. DISPONIBLE SUR POLAR+ ET MYCANAL
Une série policière qui vous amène à écouter en boucle, avec un sourire niais, « I love to love (but my baby just loves to dance) », irrésistible tube des années 1970, n’est pas une série policière comme les autres. A vrai dire, « River » se donne même pour mission de dérégler le genre avec méthode sur les pas de son héros, l’inspecteur John River, lui-même pas tout à fait d’équerre… Celui-ci passe en effet beaucoup de temps à converser avec les morts, et en particulier avec sa coéquipière, Stevie, tuée sous ses yeux.
Sur le papier, on aurait pu craindre un remake de « Sixième Sens », un ultime gadget pour réveiller la figure usée du flic brisé. En réalité, on embarque pour une épopée au pays du deuil doublée d’une romance sans complexes et piquetée de superbes répliques. La faute à Abi Morgan, l’une des créatrices britanniques les plus stimulantes de ces dernières années, qui a à son actif les scénarios de « Shame » et de « la Dame de fer », la série « The Hour » ou, récemment, « The Split ». Pour « River » (déjà diffusée en 2018 sur Arte), elle a réuni une troupe exceptionnelle : dans le rôletitre, le Suédois Stellan Skarsgård impose son émouvante carcasse face à la très charismatique Nicola Walker, dans celui de Stevie. On croise même Eddie Marsan dans le rôle d’un fantôme particulièrement coriace et Lesley Manville dans celui de la cheffe des inspecteurs – chacune de ses apparitions est une réjouissance, jusqu’à l’inoubliable scène, où l’on croit entendre la voix de la scénariste elle-même, dans cette salve exaspérée contre River qui l’enjoint à « avoir des couilles » : « Trentetrois ans que vous ne me parlez tous que de ça – vos « couilles » ! – Mais je suis arrivée au sommet sans roupettes. »