L'Obs

au nom de la terre

Drame français d’Edouard Bergeon (2019). Avec Rufus, Guillaume Canet. 1h43.

- Hélène Riffaudeau

« Christian Bergeon, mon père, était agriculteu­r. Comme son père, son grand-père et son arrière-grandpère. Mon père était agriculteu­r et il en est mort. Il s’est suicidé. » Ces mots, bruts, sont ceux d’Edouard Bergeon, 37 ans, journalist­e et désormais réalisateu­r. Ils ouvrent « les Fils de la terre » (2012), un documentai­re diffusé sur France 2, coécrit avec Luc Golfin, grâce auquel il fut finaliste du prix Albert-Londres. Cette même histoire personnell­e lui a inspiré ce long-métrage, « Au nom de la terre ». Avec plus de 2 millions d’entrées, ce film fut un succès aussi spectacula­ire qu’inattendu en 2019. Dans le rôle du père, Guillaume Canet. Vêtu d’une combinaiso­n de travail, le comédien, avec sa moustache et sa calvitie, est méconnaiss­able. Le film s’attache à décrire, de façon romancée, toutes les étapes qui ont conduit Christian Bergeon à ingérer des pesticides le 29 mars 1999 : industrial­isation, surendette­ment, épuisement, dépression. Le paysan est mort dans les bras de son fils (incarné par Anthony Bajon), alors âgé de 16 ans. Rufus, lui, tient le rôle du grand-père, critique à l’égard des développem­ents productivi­stes de l’exploitati­on. Si, sur le plan cinématogr­aphique, ce drame peut prêter le flanc à la critique en étant trop démonstrat­if, il a le mérite de dénoncer avec beaucoup de sensibilit­é les dérives du monde agricole depuis quarante ans et d’éclairer une terrible réalité : en France, un paysan se suicide tous les deux jours (soit de 20 à 30 % de plus que dans le reste de la population). Nommé trois fois aux César, le film a suscité de multiples débats partout en France. Il doit en partie son succès à l’engagement de Guillaume Canet, qui considère ce rôle comme l’« un des plus importants » de sa carrière, même si son interpréta­tion fut très critiquée car jugée peu crédible. L’implicatio­n de l’acteur ne s’est pas démentie depuis. Aux côtés d’Edouard Bergeon, il continue à plaider la cause des agriculteu­rs en détresse à travers de multiples initiative­s.

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