L'Obs

Alicia Keys, femme en cheveux

ALICIA, PAR ALICIA KEYS (SONY MUSIC).

- FABRICE PLISKIN

Divaguons. les meilleurs disques d’alicia Keys seraient-ils ceux sur la couverture desquels elle porte une coiffure d’inspiratio­n africaine, tel « alicia », son septième disque studio, où elle pose, sous quatre angles différents, avec des tresses peules frisottées de ce qu’on appelle des baby hairs ? Théorie séduisante mais, on en conviendra, tirée par les cheveux, qu’elle portait tressés sur ses deux meilleurs albums, ses deux premiers (« songs in a Minor », « The Diary of alicia Keys »), et artistemen­t nappy sur le médiocre « Here ».

Depuis 2016, l’artiste, peut-être par féminisme, a abjuré le maquillage. au raffinemen­t cosmétique des superstars r’n’B, elle oppose sa nature de « natural Woman », comme disait si bien aretha Franklin. cette absence d’artifices s’entend dans sa grande voix claire et nue. celle de Beyoncé, par exemple, semble s’adresser moins à un individu qu’à un stade : on dirait toujours qu’elle chante pour décrocher la médaille d’or. Traversée de lyriques arabesques, de ce lyrisme que résume le vers d’alfred de Vigny, « Toi seule me parus ce qu’on cherche toujours », la voix d’alicia Keys, « fille en feu », femme en cheveux, sait vous faire croire qu’elle s’adresse à vous, jusqu’à vous transporte­r parfois (que fait la police?) jusqu’aux obscures frontières de votre propre érotomanie. s’il n’atteint pas à la grâce de ses débuts ou à la splendeur chef-d’oeuvresque de son tube « empire state of Mind », ce nouveau disque contient quelques merveilles. « Truth Without love », la chanson qui ouvre « alicia », avec son piano et sa boucle de violons ensauvagés d’ad-libs hiphop, en est une. Funk accrocheur et mélancoliq­ue, « authors of Forever » sonne comme un beau pastiche de Mary J. Blige. exercice de dancehall élégiaque pour marimba, « Me x 7 » est un voyage au centre de l’adorable. autre heureux moment : « Jill scott », où Keys, prodigue en « lalala », rend hommage à sa consoeur, la sous-estimée Jill scott, qui chante à ses côtés. Dommage que « perfect Way to Die », ballade protestata­ire en faveur du mouvement Black lives Matter, ne soit pas à la hauteur de la noble cause qu’elle défend.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France