L'Obs

Pauvre Iphigénie !

IPHIGÉNIE, PAR JEAN RACINE. ODÉON-ATELIERS BERTHIER, PARIS-17E, 01-44-85-40-40, 20 HEURES. JUSQU’AU 14 NOVEMBRE.

- JACQUES NERSON

A voir ce spectacle on pourrait penser que la tragédie française est devenue injouable, trop loin de nous. Surtout « Iphigénie » où un père, Agamemnon, accepte d’immoler sa fille afin de se rendre les dieux propices. Tout ça pour que Zéphyr s’entonne dans les voiles des Grecs et les porte jusqu’aux rives de Troie ! Si la motivation d’Agamemnon peut sembler archaïque, c’est surtout l’interpréta­tion qui pèche. Antoine Vitez pensait qu’il faut déclamer l’alexandrin comme un récitatif ; Roger Planchon donnait la priorité au sens, quitte à briser la mélodie ; Stéphane Braunschwe­ig, lui, sonorise ses acteurs pour rendre leur jeu plus quotidien, plus cinéma. Résultat, le décalage entre le ton et les paroles, entre la langue sublimisée des héros tragiques et cette élocution trivialisé­e aboutit au ridicule. Il faut avoir du muscle pour manier le vers classique. Ici, les acteurs peinent à soulever cette épée trop lourde pour eux. Et le micro ne les rend pas plus audibles. Au contraire, ils se croient dispensés d’articuler. Curieux que Braunschwe­ig n’ait tiré aucune leçon de son « Britannicu­s », monté à la Comédie-Française en 2016, où Néron devenait un banal cadre supérieur. Son « Iphigénie » sans inventivit­é est plus encore pâlichonne.

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