L'Obs

Un drôle de métier

- François Sionneau

La Formidable Ascension sociale temporaire de G. Verstraete­n, par Guillermo Guiz. En tournée.

Guillermo Guiz a hésité avant de remonter sur scène. Après le succès de ses deux premiers spectacles et de ses nombreuses chroniques sur FranceInte­r dans « la Bande originale » de Nagui, l’humoriste belge s’est retrouvé face à une évidence douloureus­e : ce fils d’un père communiste s’est fait happer par « le système » contre lequel il s’est tant battu « mais qui a fini par gagner ». A 42 ans, cet heureux propriétai­re d’un bel appartemen­t dans le centre de Bruxelles a découvert les plaisirs du beau « linge de maison » et compte bien s’offrir « un nouveau Velux ». De ce constat naît un questionne­ment : peut-on faire rire de cette « formidable ascension sociale » qu’il qualifie lui-même de « temporaire » ? Malgré tous les doutes que le quadra partage avec son public, la réponse est indubitabl­ement oui. Rares sont les spectacles de stand-up aussi construits et aussi profonds. Ce grand anxieux de nature parvient à manier l’autodérisi­on, l’absurde et le sens de la punchline à un rythme effréné durant une heure et demie. Les mains dans les poches, il enchaîne de son phrasé inimitable les réflexions sur les humoristes (« les punaises de lit de l’art »), la réussite sociale (« C’est plus facile d’être un consommate­ur responsabl­e quand on ne peut rien consommer ») voire la théorie politique (« La dictature ? Finalement, on n’a jamais essayé avec un chouette type… »). Si Guillermo Guiz récuse la qualificat­ion d’« artiste », la trouvant plus adaptée à Van Gogh qu’à lui-même, on peut pourtant l’assurer : du stand-up comme celui-là, c’est du grand art.

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↑ Guillermo Guiz manie l’autodérisi­on et le sens de la punchline à un rythme effréné.

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