L'Obs

L’ENNEMI PUBLIC NUMÉRO 1

AI WEIWEI, L’ART DE LA DISSIDENCE

- NEBIA BENDJEBBOU­R

Documentai­re de Caroline Bennarosh (2023). 52 min.

Le 12 août 2009, la police chinoise frappe à 3 heures du matin à la porte d’Ai Weiwei pour un contrôle d’identité... Le lendemain, l’artiste se photograph­ie sur son lit d’hôpital après une opération du crâne. Sur le cliché, il fait un doigt d’honneur, adressé au pouvoir. Des années plus tard, depuis sa résidence au Portugal, il raconte son parcours hors norme. Architecte, sculpteur, plasticien, photograph­e, cinéaste, blogueur, Ai Weiwei est un fervent défenseur de la liberté d’expression en Chine et dans le monde. Il doit sa notoriété à ses oeuvres gigantesqu­es et à sa participat­ion à la conception du « Nid d’oiseau », l’emblématiq­ue stade olympique de Pékin en 2008, qu’il appellera à boycotter pour protester contre la dictature. Né en 1957, fils du poète Ai Qing, qui était considéré par Mao Zedong comme « de droite et contre-révolution­naire », il fut déporté avec sa famille dans le Xinjiang. Lors d’un long séjour aux Etats-Unis (1981-1993), il se découvre une passion pour Marcel Duchamp, l’art moderne occidental et surtout la liberté, notamment celle de manifester. De retour à Pékin, il se passionne pour la culture ancestrale de son pays que le régime tente d’effacer. Accro aux réseaux sociaux, il y exprime sa colère et utilise son blog pour dénoncer la corruption lors du tremblemen­t de terre au Sichuan en 2008. Indigné par le silence des autorités sur le nombre d’enfants morts sous les décombres de leurs écoles, il se met à documenter ce drame en révélant les noms de 5 200 victimes. Ces écoles sarcophage­s avaient été construite­s avec des matériaux de mauvaise qualité, au mépris des normes de sécurité, à la différence des bâtiments officiels. Il rend hommage aux victimes dans « Straight », une oeuvre composée de tiges d’acier récupérées illégaleme­nt sur les ruines du séisme. Il est arrêté en avril 2011 et emprisonné, avant d’être assigné à résidence, où il nargue le régime en parodiant le tube sud-coréen « Gangnam Style », menottes aux poignets. Exilé, il prend depuis fait et cause pour les réfugiés et dénonce la lâcheté et l’hypocrisie de l’Occident face à leur terrible sort. A 66 ans, celui qui se « fiche d’être un artiste ou un activiste » assure qu’il ne cessera jamais le combat.

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