CECI N’EST PAS UNE BIBLIOTHÈQUE
Candida Höfer
Bien loin de l’innocence qu’évoque son prénom, Candida Höfer pose depuis une trentaine d’années, avec une rigueur toute scientifque, un regard d’entomologiste sur des architectures qu’elle fxe dans leur entière nudité. Nulle fgure humaine ni animale n’est conviée à son considérable catalogue mental des lieux du savoir, du pouvoir – académies des Beaux-Arts, musées, théâtres, châteaux, églises, bibliothèques privées et universitaires.... Une sorte de monstration à multiples visages de la même image obsessionnelle. A l’instar de Bernd et Hilla Becher, dont elle a suivi les cours de photographie à l’Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf. Qui, à partir de la fn des années cinquante, ont consigné bâtiments et paysages industriels choisis avec soin et saisis à la chambre, leur conférant une considérable précision dans les détails. La bibliothèque Li Yuan, édifée en 2011 par Li Xiaodong à Jiaojiehe, au nord de Pékin, a aussitôt retenu l’intérêt de Candida Höfer. Les visiteurs s’y rendent pour y lire et faire don d’ouvrages. S’organise ainsi une circulation d’outils de savoir académique, en même temps que s’installent et se renforcent des liens humains intangibles au fur et à mesure des migrations de livres. La restitution de cet édifce convoque une approche diférente de celle adoptée par Höfer dans le cadre des représentations de bibliothèques qu’elle a entrepris depuis de nombreuses années. Elle délaisse ici l’appareilphotographique volumineux pour un matériel plus maniable, inscrit dans la main, apte à en être le prolongement quasi-naturel. Mobilité, réduction des contraintes d’organisation, retour aux sources, mais également nouvelle façon, pour Höfer, d’envisager la photographie. “Si l’objet d’étude n’a pas changé au cours du temps, ma manière de photographier, elle, a beaucoup évolué. Enormément acquis en densité et en concentration.” Visions vertigineuses d’étagères habités de savoirs, rayonnages désertés. Souvenir. Métallique, comme l’absence. Abolir la distance avec les objets, en identifer la nature, en restituer la teneur, dans leurs couleurs et leurs formes. Dans la persistance de l’idée originelle, Candida Höfer donne la parole au silence.
CANDIDA HÖFER, SILKY, 2015, (EN FOND). CANDIDA HÖFER, STEPS, 2014. CANDIDA HÖFER, LI YUAN LIBRARY I, 2014.
CANDIDA HÖFER, LI YUAN LIBRARY III, 2014.
CANDIDA HöFER, TRACES. 2014.
CANDIDA HöFER, MAP, 2015.