Je ne peux plus payer mes fournisseurs
UN été pluvieux et froid pour un glacier, l’arrivée d’un concurrent de taille dans votre zone de chalandise, un changement de matériel plus coûteux que prévu… Bien des raisons peuvent assécher la trésorerie d’un franchisé. Mais s’il ne peut plus payer ses fournisseurs, tout indique que sa situation économique est préoccupante… Car si ses partenaires, lassés par ses dettes, refusent de le livrer, son activité sera compromise… Pour éviter une telle impasse, tout un panel d’options s’offre à vous, même quand la situation semble désespérée. “En échange d’un délai de paiement, engagez vous contractuellement sur la durée avec ce fournisseur. Les carnets de commande sont parfois durs à remplir et le détaillant peut vouloir conserver le client en dépit de ses difficultés”, remarque Monique Ben Soussen, avocat au sein du cabinet BSM. En effet, un grossiste d’ampleur nationale aura beaucoup moins de scrupules à vous couper les vivres qu’un détaillant local aux fins de mois difficiles…
Comptez sur le soutien de votre franchiseur
Si cette démarche individuelle a des chances de porter ses fruits, ne sous-estimez pas l’expertise de votre enseigne. “Ne lui cachez pas vos difficultés, même s’il faut éviter la communication à outrance. Par exemple, la tête de réseau peut guider son franchisé en estimant le taux de fréquentation et de transformation de sa boutique”, commente Gaëlle Toussaint-David, avocat au sein du cabinet Simon et associés. Suite à cet état des lieux, certaines redevances sont éventuellement repoussées et l’enseigne peut même se porter garant auprès des fournisseurs pour qu’ils maintiennent les livraisons. Si ce dispositif ne suffit pas, entrer en pourparlers avec l’administration fiscale et l’Urssaf est une bonne option. “Les reports de paiement dégagent de la trésorerie. Ces demandes ont surtout de
bonnes chances d’être acceptées si vous pouvez vous rétablir assez rapidement. Quand le mal est profond, les négociations sont compliquées”, précise Marie Robineau, avocat au sein du cabinet Simon et associés. Mais ne vous lancez pas
trop vite. “Un point de vente peut avoir intérêt à accumuler un trimestre de dettes Urssaf pour préserver sa trésorerie. Déjà, cela le maintiendra au dessus de la ligne de flottaison. Et d’une certaine manière, il faut être suffisamment freiné pour que les aménagements fiscaux soient recevables et profitables”, analyse Monique Ben Sousssen, qui a déjà conseillé des franchisés dans de telles situations.
Une priorité : négocier avec votre banque
Si vous avez des prêts à rembourser, demandez des aménagements à votre conseiller. En effet, votre établissement bancaire n’a aucun intérêt à ce que vous mettiez la clé sous la porte ! Comme les encours sont souvent une ligne de budget importante pour les franchisés, cette solution dégage durablement de la tréso-
Confronté à des problèmes de trésorerie, un franchisé peut ne plus pouvoir régler les factures dues à ses fournisseurs. Entre lucidité et réactivité, voici quelques conseils pratiques. Pierre TOURTOIS L’enseigne peut se porter garante auprès des fournisseurs”
rerie. Et vous pourrez enfin payer
vos fournisseurs. “Négociez via une procédure de conciliation ou via un mandat ad hoc. Si vous avez une dette bancaire, mettons un crédit finançant votre matériel de cuisine, vous pouvez obtenir un report de son paiement. Par exemple en ne payant que les intérêts pendant 12 ou 24 mois”, précise Marie Robineau. Selon Monique Ben Soussen, il arrive même que la banque accepte de suspendre le remboursement pendant un an et impute les échéances impayées en fin de prêt. “Une conciliation en justice facilite les choses : le président du tribunal de commerce demande à l’expert comptable du franchisé de vérifier sa stratégie, ce qui rassure la banque. Et ce dispositif protège l’image et la réputation de l’entreprise, dans la mesure www.officieldelafranchise.fr
où ses difficultés ne sont pas rendues publiques”, remarque Marie Robineau. Prudence, tou
tefois. “Si la situation financière du point de vente est “limite”, l’administrateur judiciaire peut vous placer en redressement judiciaire. Votre avocat doit se renseigner sur son profil. Certains
sont beaucoup plus tatillons que
d’autres”, prévient Monique Ben Soussen. Reste alors en dernier recours la possibilité de demander au tribunal de commerce des délais concernant le paiement des fournisseurs, dans le cadre de l’article 1244 du Code civil. “Ces délais ne peuvent pas excéder deux ans. La plupart du temps, le tribunal rend un jugement accordant des délais mais prévoyant aussi la déchéance du terme en cas de non-paiement d’un seule échéance”, précise Monique Ben Soussen. Bref, une fois de plus, la rigueur et la communication sont les clés.