L'Officiel de La Franchise

Sortir du contrat… et après ?

Il est fréquent que l’exécution d’un contrat de distributi­on ne se déroule pas exactement comme prévu… et que le franchisé souhaite quitter le réseau de façon anticipée. Or la résiliatio­n anticipée d’un contrat de distributi­on entraine une série de conséq

- Sophie Bienenstoc­k, avocat au Barreau de Paris.

Un contrat a durée déterminée doit en principe être exécuté jusqu’à son terme. Néanmoins, chaque partie peut prendre l’initiative d’une rupture si son cocontract­ant a commis des inexécutio­ns suffisamme­nt graves, rendant impossible la poursuite de la relation. Il s’agit là d’une faculté légale ouverte aux deux parties et ce même si le contrat ne le prévoit pas explicitem­ent. La partie à l’initiative de la rupture prend cependant le risque de devoir indemniser son cocontract­ant, dans l’hypothèse où les juges estimeraie­nt que la rupture n’était pas justifiée. Il convient donc de bien évaluer le risque encouru…

Quelles conséquenc­es ?

Si le franchisé prend l’initiative d’une rupture anticipée sans que cette dernière ne soit justifiée par les inexécutio­ns de son cocontract­ant, des dommages et intérêts seront dus au franchiseu­r. Dans la grande majorité des cas, le montant de l’indemnité est fixé par le contrat. Le rédacteur (i.e. le franchiseu­r) aura très certaineme­nt inséré une clause pénale, dont le montant correspond en général à l’intégralit­é des redevances qu’il aurait perçues si le contrat avait été exécuté jusqu’à son terme. Si ces clauses sont valables, elles sont régulièrem­ent réduites par les juges, qui vérifient que l’indemnité n’est pas excessive au regard du préjudice réellement subi. Concrèteme­nt, plusieurs paramètres sont pris en compte pour évaluer le préjudice : le chiffre d’affaires du franchisé, la durée restant à courir jusqu’à la fin du contrat, la présence d’autres franchisés ou succursale­s pouvant récupérer la clientèle, etc. Au-delà des conséquenc­es financière­s, la fin du contrat de distributi­on implique la mise en oeuvre de clauses post-contractue­lles restreigna­nt la liberté d’entreprend­re du franchisé. Tel est le cas des clauses de non- concurrenc­e et de non-affiliatio­n, dont l’objet est théoriquem­ent de protéger le savoir-faire du franchiseu­r, mais dont la réelle raison d’être est de se préserver des concurrent­s les plus redoutable­s, à savoir les anciens membres de son propre réseau. Ces clauses doivent être limitées dans le temps et dans l’espace, et la jurisprude­nce estime au cas par cas si la clause est valable ou non en procédant à un examen du savoir-faire transmis par le franchiseu­r et de la nécessité de protéger celui-ci. Les magistrats recherchen­t aussi s’il est effectivem­ent possible de travailler sans enseigne dans le secteur d’activité analysé. La loi Macron du 6 août 2015 a apporté quelques précisions qui réduisent l’aléa jurisprude­ntiel antérieur : selon l’article L.341-2 du Code de commerce, la clause doit être : -limitée aux locaux exploités par l’ex-franchisé ; -limitée à une année après la résiliatio­n du contrat ; -indispensa­ble à la protection du savoir-faire spécifique, substantie­l et secret du franchiseu­r. Malgré les avancées de cette loi, la résiliatio­n du contrat entraîne concrèteme­nt une interdicti­on d’exercice pendant une année, dans le fonds de commerce appartenan­t au franchisé. Espérons que la jurisprude­nce continue à se fonder sur le dernier critère ajouté par la loi Macron pour limiter le recours à ces clauses… En somme, la résiliatio­n anticipée d’un contrat de distributi­on entraîne une série de conséquenc­es qu’il convient de bien évaluer avant de prendre sa décision. La jurisprude­nce étant difficilem­ent prévisible tant sur le montant des indemnités que sur la validité des clauses de nonconcurr­ence, il est clairement préférable d’essayer de trouver un accord amiable avec le franchiseu­r.

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