DENIS TURPIN
Responsable de marché 2/3-RM de Continental France
« La consigne que donne Continental à ses ingénieurs est de sortir le meilleur produit »
Avotre prise de fonction chez Continental, en 2010, quel était l’objectif du manufacturier ? Lorsque Continental a décidé de distribuer en direct, sans passer par un importateur, j’ai été chargé de repositionner la marque Continental sur le marché du 2/3-RM en France. Non qu’elle n’y était pas connue, mais elle l’était surtout dans l’auto et le poids-lourd. Ma mission se résumait simplement : prendre des parts de marché à hauteur de la notoriété de la marque, et affirmer son positionnement haut de gamme. Nous comptions entre autres sur le fait que nombre de motards sont aussi automobilistes…
Quels méthodes et moyens ont été engagés pour atteindre l’objectif ? À partir de 2008, Continental a décidé d’investir massivement dans la recherche et le développement, en sorte de prendre l’avantage sur quelques-uns de ses concurrents au plan technologique. Depuis, on se présente et on communique en insistant sur la performance de nos produits. Nous estimons que ce sont les meilleurs. C’est d’ailleurs la consigne que donne en permanence le patron aux ingénieurs : sortir le meilleur produit dans telle et telle catégorie. Si nous n’y parvenons pas, le produit ne sort pas. Cela suppose aussi, naturellement, de connaître les attentes du client. Par ailleurs, chez nous, chaque responsable de marché est motard et passionné par son métier. L’autre levier, c’est le choix de ses distributeurs. Nous avons sélectionné les meilleurs : Bihr pour la moto, CGN pour le scooter et Allo Pneu et 1001 Pneus pour la vente par internet. Tous sont apporteurs de services de haut niveau. Continental est une marque de spécialistes et doit être identifiée comme telle.
Comment réagit le réseau français de la revente ? Il s’est montré à l’écoute et sensible à nos arguments. Nous sommes conscients qu’il lui faut de la marge pour travailler correctement. Avec nous, il achète au même prix toute l’année, afin qu’il maîtrise sa marge et établisse sa politique commerciale. Nous nous devons de proposer des conditions simples aux pros : ils doivent savoir à tout moment combien ils achètent un pneu. Et nous leur rappelons qu’un pneu, ce ne sont pas que des dimensions et un prix. Il faut questionner le client, lui expliquer quel produit est le plus adapté à son usage. En 10 ans, nos volumes en France ont été multipliés par cinq. Nos clients se sont approprié la marque, même si nous avons encore de la conquête à mener.
Où en est cette conquête en France ? Là où nous avons le plus progressé, c’est sur le segment sport-touring, c’est-à-dire le plus gros du marché de la moto. En 2020, le Conti Road nous y a aidé. C’est un super produit, très bien placé sur le créneau que nous appelons la seconde ligne, là où il est possible de prendre l’avantage en qualité/prix, parce qu’à prix comparable, nous proposons un produit qui met en oeuvre une technologie plus récente que celle de nos concurrents. L’idée, c’est de maintenir cette avance technologique pour continuer à progresser en termes de parts de marché. Les consommateurs sont de mieux en mieux informés et de plus en plus exigeants. C’est aussi pourquoi l’investissement en R&D doit être permanent. J’ajoute que cette conquête, pour moi, passe également par le fait de rouler avec d’autres motards, de leur parler en toutes occasions, y compris aux 24 H du Mans, au Bol d’or ou au Motogp. Elle nécessite, enfin, de prendre le temps d’écouter les distributeurs.
En cette rentrée 2020, quel fait d’actualité retient votre attention ? La crise virale a fait exploser les coûts de transport de produits comme les nôtres. Pour les entreprises chargées de ça, au moment où la demande repart à la hausse, il est bien plus profitable de livrer un smartphone haut de gamme commandé en ligne qu’un pneu… Les coûts d’acheminement de produits plus contraignants ont donc augmenté. Heureusement que nous disposons, entre Orléans et Blois, d’un stock correspondant à environ deux mois de livraisons. Nous sommes capables de livrer en 24 heures partout. Il semble en outre que le secteur du deux-roues tire son épingle du jeu dans cette crise. Nous sommes optimistes : nous tablons sur un + 5 % de nos volumes à fin 2020.