Cinq sur Cinq
Née de l’intuition de l’entreprenant Franck Fazio, la marque de gants Five a su s’élever au fil des années pour devenir une référence dans son domaine. De son centre d’avignon, sont imaginés par une équipe jeune et dynamique, les modèles qui protègent les motards de toutes obédiences.
Tapi au fin fond de la zone industrielle du Pontet près d’avignon, le bâtiment qui abrite l’activité de Five ne paie pas de mine. Une discrétion voulue et assumée. Si ce n’est un van aux couleurs de la marque parqué sur le côté et un logo proche de la porte d’entrée, rien ne trahit l’activité du lieu. Ici siège cette jeune marque créée en 2005 et qui a su s’imposer comme une griffe, non pas française mais internationale, avec un nom qui sonne finalement comme une évidence : Five, cinq, le nombre de doigts de la main à protéger. Partie de rien, la marque s’est inscrite dans le paysage avec un marketing pertinent et un message clair : proposer le meilleur gant dans chaque catégorie où elle s’engage, dans la route comme dans le tout-terrain, dans la moto comme dans le vélo. Aujourd’hui, Five est une entreprise prospère qui emploie une trentaine de personnes et génère près de dix millions d’euros de chiffre d’affaires. Elle a été absorbée depuis mai 2019 par le puissant groupe DC Expansion, ce qui va lui permettre d’accélérer son développement. Dominique Cognée, le patron de cette holding familiale, entend en effet faire passer de nouvelles étapes à cette entreprise qu’il a rachetée à son fondateur, Franck Fazio. Notamment élargir son audience en investissant de nouveaux marchés où elle est soit absente, soit insuffisamment représentée comme aux États-unis.
Et étendre la production de gants à de nouveaux secteurs d’activités, si cela fait sens. Avec une production proche de 500 000 paires à l’année, Five est un déjà acteur qui pèse dans l’industrie du gant moto où les pure players comme lui sont rares.
Dans les show-rooms, la marque est en concurrence avec des équipementiers de premier rang, ce qui n’est pas pour lui faciliter la tâche quand il faut convaincre les détaillants de référencer ses produits, la commodité pour ces derniers étant de prendre les modèles de leurs habituels fournisseurs de vêtements. Pour autant,
Five a réussi à dépasser cette difficulté majeure à travers une large gamme et des produits qualitatifs qui ont contribué à son essor sur le marché. Ce n’était pas gagné quand Franck Fazio, bien connu dans l’industrie pour avoir distribué de nombreuses marques en France (Alpinestars, Vemar, Oxtar devenue TCX, et bien d’autres…) avec son agence commerciale, ACE, s’est lancé dans cette aventure. L’idée était de s’affranchir définitivement des contraintes liées au bon vouloir de ses concédants et de devenir le patron de son propre label. Mais comment monter un business sans grands moyens ?
Une place à prendre
« À l’origine de Five, il y a Franck Fazio, mais aussi deux de ses amis pilotes, Stéphane Chambon et Marc Garcia. Ils ont eu l’idée de se lancer dans le gant tout simplement parce que c’était le produit le plus facilement commercialisable financièrement parlant et qu’il y avait une place à prendre. Il n’existait aucun spécialiste du gant à l’échelle planétaire. Là où Franck a été pertinent, c’est qu’il a tout de suite lancé Five comme une marque internationale, il ne s’est pas concentré sur le marché français, il a d’abord pris des distributeurs dans des pays leaders. Il demandait à ses clients de payer les produits à l’avance, ce qui lui permettait de financer la production en Asie. Il a construit les débuts de sa marque sur ce modèle-là. » explique Stéphane Franc, responsable de la communication et du marketing chez Five depuis fin 2013 et qui a contribué à donner à la marque sa dimension actuelle. C’était évidemment un bon départ si l’on s’en réfère à la façon dont s’est poursuivie l’aventure. Au fil des années, la gamme comme l’équipe se sont enrichies. Après les premiers gants
off-road, Five s’est orientée rapidement vers la route, là où est l’essentiel de l’activité. En concevant ses modèles en interne tout en s’appuyant sur l’expérience d’un gantier italien, véritable orfèvre du domaine, pour parfaire ses patronages, la marque a accru son expertise pour proposer au marché des produits de plus en plus optimisés, portés par des champions triés sur le volet pour en assurer la promotion – bien que la faible visibilité des gants soit un réel handicap en termes d’exposition. « Notre force, c’est d’être des spécialistes du gant. Un généraliste de l’équipement ne peut pas porter autant d’attention sur ce type de produit car il ne fait pas le gros de son chiffre d’affaires avec. Il ne peut pas mettre autant de ressources que nous qui y consacrons 100 % de notre temps. Faire un beau gant, c’est assez simple, mais faire un gant confortable et protecteur, c’est autre chose. Le “fitting” est ce qui fait la touche Five, il est lié à la conception de nos gants : nous avons un patronage unique qui nécessite des outillages spéciaux exclusifs à Five. Chaque gant est spécifique et chacun des éléments qui le composent est spécial, il est dessiné chez nous puis produit dans nos usines sous-traitantes en Chine et au Pakistan avec lesquelles nous avons des joint-ventures. Nous avons des employés sur place ce qui nous permet de nous assurer du respect de nos critères et standards de qualité. » assure Xavier Redois, le DG de la marque. Production asiatique donc mais conception et dessin assurés en France, notamment par les designers maison, eux-mêmes pratiquant activement la moto. La micro-gamme du début a laissé place à une vaste famille de quelque 90 gants qui va du Globe, un modèle entrée de gamme pour un usage urbain à 29 €, au top du top, le RFX Race, un gant type Motogp à 450 €.
Elle intéresse quasiment toutes les disciplines sportives de la moto, certaines du vélo, ainsi que l’usage routier quotidien. Toute cette production Five est exposée dans le grand show-room du bâtiment et l’étalage est assez impressionnant pour le visiteur. Celui-ci peut par ailleurs rencontrer une part importante du staff dans les couloirs puisque pratiquement tout le monde travaille sur place. Ce qui permet de croiser des visages connus comme ceux de Boris Chambon, ex-star du supermotard français, et de Matthieu Lalloz, top-crossman au tournant des années 2000, tous deux en charge de la R&D ; ou encore celui de Théo Bolley, ex-espoir de l’enduro français, missionné sur la relation pilotes et les réseaux sociaux. La gestion, la direction générale, l’administration des ventes, le marketing, le bureau des designers et une cuisine/bar complètent les headquarters de Five au Pontet. Jusqu’à l’été dernier, le stock était situé dans une zone industrielle contigüe mais l’intégration au groupe DC Expansion a provoqué son déménagement à Tauxigny au sein de la performante unité logistique du groupe. De cette plateforme sont livrés les gants destinés aux revendeurs français et à certains frontaliers.
Ambitions en France
Le déploiement de Five sur notre marché remonte à peu, une demi-douzaine d’années, et s’est accéléré en 2016 avec l’obligation pour les 2-Rmistes de porter des gants. La marque estime représenter 10 % du marché français mais elle ambitionne de s’y imposer encore davantage même si l’export reste le socle qui lui a permis de bâtir sa réussite jusque-là. « Le succès de Five, c’est de faire un produit qui fait la différence. Malheureusement, le gant dans le 2-roues motorisé ou le vélo est vendu la plupart du temps en libre-service dans les magasins, il n’est pas explicité par un vendeur, et c’est un handicap pour nous qui vendons des modèles très techniques. Mais on a cette chance d’avoir un fitting vraiment top qui convainc le client quand il essaye notre produit face à d’autres. C’est notre meilleur argument de vente. » assure Xavier Redois qui compte bien prolonger cette tendance de + 50 % de chiffre d’affaires réalisée au cours des trois dernières années sur les trois prochaines. Voire sur les… cinq.