L'officiel

Le Rêve bleu de Boucheron —

- PAR HERVÉ DEWINTRE PHOTOGRAPH­IE FLORIAN JOYE

“The Escape”, la sixième collection de haute joaillerie Louis Vuitton, ressuscite les partis pris du mouvement Streamline Moderne, un style architectu­ral

universel, résolument tourné vers l’avenir et le progrès.

Le métier de designer est né dans les années 1930, aux États-unis, en réponse à la Grande Dépression. Cette naissance fut favorisée dans une très large mesure par une ramificati­on tardive de l’art déco : le Streamline Moderne. C’était à la fois un style architectu­ral, dont la première source d’inspiratio­n fut l’univers du voyage, alors à la pointe de la science et du progrès, mais aussi une apologie du mouvement, caractéris­ée par l’émergence de longues lignes horizontal­es, et qui portait en triomphe les formes courbes empruntées à l’aéronautiq­ue et aux coques des bateaux transatlan­tiques. Sa philosophi­e était simple, il s’agissait de ne plus être simplement fonctionne­l mais de dessiner des futurs possibles où le bien-être avait toute sa part. Non seulement ce paradigme inédit signa l’apparition d’une nouvelle profession, mais il favorisa le déploiemen­t d’une esthétique qui, tout en s’appliquant à l’ensemble des arts, pénétra dans les foyers du monde entier. Cette ode à l’évasion, libre et féconde comme le sont tous les départs imminents, Louis Vuitton la développa à l’époque avec le sac “Keepall”, adopté avec enthousias­me par une clientèle éclairée. On pense naturellem­ent à Sara et Gerald Murphy, ces riches Américains de la Côte Est dont la légende retient qu’ils furent les premiers à persuader le propriétai­re de l’hôtel du Cap-eden-roc, à Antibes, de rester ouvert durant l’été, au grand étonnement de la bonne société de la Riviera qui aurait préféré mille morts, comme nous le raconte l’écrivain américain John Dos Passos, plutôt que d’y être vue à cette saison. Il est vrai que le bon ton de l’époque exigeait une émigration empressée vers les fraîches plages de la Manche aux premiers rayons un peu trop ardents du soleil.

DOUCEUR DES COURBES

F. Scott Fitzgerald s’inspira de ce couple doué pour le bonheur pour créer les héros de son roman Tendre est la nuit, publié en 1934. La dédicace du livre donne le ton de l’époque : “Pour Gerald et Sara, tant de fêtes…” Près des eaux calmes, cristallin­es et salées de la Méditerran­ée, les Murphy furent au centre d’un cénacle moderne, sportif et joyeux qui inventa un art de vivre inspirant, où l’élégance et le confort vivaient en harmonie. Ce manifeste d’énergie trouve de riches correspond­ances dans la sixième collection de haute joaillerie Louis Vuitton, “Acte V – The Escape”. Chaque parure développe une extrême fluidité, avec un florilège de colliers Bayadère souples et monumentau­x, de bracelets sensuels, de clips d’oreilles voluptueux et de bagues opulentes. Le V, quant à lui, imprime sa signature sur l’ensemble de la collection. Un V multiple, hybride, qui se nourrit de la spécificit­é déployée par le style “paquebot” pour tour à tour s’initier à la douceur des courbes, s’évanouir dans l’abstractio­n, filer la métaphore aquatique, explorer le motif éventail ou camper une fleur de lotus. Les perspectiv­es s’agrandisse­nt volontiers sur de longues chutes de perles dont le diamètre et la teinte offrent des dégradés inédits, comme pour accentuer la dynamique dans le mouvement et convoquer les plus frappantes fulgurance­s de l’op Art.

MERVEILLES DU MONDE

L’ensemble est exalté par des gemmes dont les caractéris­tiques exceptionn­elles expliquent les longues et patientes recherches mises en oeuvre pour les découvrir. Que ce soit cette tourmaline Paraiba de 32 carats qui brille d’un puissant contraste avec des perles noires, ces émeraudes qui verdoient de leur éclat le plus vif, cette opale australien­ne de 30 carats, venue des prestigieu­ses mines de Lightning Ridge et dont les feux étincelant­s évoluent le long de sa forme triangulai­re comme un crépuscule incandesce­nt ; que ce soit ces perles grises dont le lustre est intensifié par la force de l’onyx et le bleu denim, rare et pénétrant, d’un saphir Pien Pyit ; que ce soit ces spinelles aux teintes franches, loupe clean, sans deuxième nuance, ce rubis du Tadjikista­n à la couleur remarquabl­e, ce saphir violet d’une saturation vibrante, ce grenat tsavorite dont les extraordin­aires propriétés de brillance le rapprochen­t d’un diamant vert, ces tourmaline­s aux teintes rares que la nature a définitive­ment cessé de prodiguer; ces perles Akoya, réputées pour leur lustre, qui ondulent comme le sillage d’un bateau… Toutes ces merveilles se recommande­nt à l’oeil du connaisseu­r et hypnotisen­t le regard pour l’entraîner dans un hymne d’allégresse et de foi en des lendemains heureux.

DE GAUCHE à DROITE : BAGUE EN OR GRIS ET PLATINE, UNE OPALE D’AUSTRALIE ET DIAMANTS. BAGUE EN OR GRIS, UNE ÉMERAUDE, LAQUE ET DIAMANTS. BAGUE EN OR GRIS, UNE TOURMALINE INDIGOLITE,

ÉMAIL “GRAND FEU” ET DIAMANTS, COLLECTION “ACTEV THE ESCAPE”, LOUIS VUITTON.

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