L'officiel

La mode rock en héritage

Sa mère, Sybil Buck, icône grunge aux cheveux écarlates, a révolution­né le catwalk dans les 90s avant de mener sa propre vie d’artiste et de musicienne, hors de la mode. Aujourd’hui, Puma Rose suit les pas de sa mère et vient de faire sa première fashion

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À Milan il y a un mois, elle a arpenté le catwalk fait d’imprimé psychédéli­que du défilé Miu Miu d’un pas assuré : une princesse néo-punk vêtue d’une longue robe rose à taille Empire rebrodée de perles, babies à plates-formes rouges, lunettes 80s et gants violets. Avec ses longs cheveux rouges et son air rebelle, Puma Rose a rappelé avec émotion aux invités du show une icône de la mode 90s : Sybil Buck, la top modèle reine du grunge, sa mère. Puma n’a participé qu’à une poignée de défilés pour la saison automne-hiver 2020-21 mais pas des moindres : Marc Jacobs, Koché, Marine Serre et Matty Bovan. Suivant ainsi les pas de sa mère qui, en 1991, avait défié tous les archétypes du mannequina­t. Née à Versailles, mais ayant grandi dans le Connecticu­t, Sybil Buck arrive à Paris (son rêve) pour faire des études artistique­s, et tente de les financer en devenant mannequin. Elle joue de la basse, porte une panoplie Dr. Martens-t-shirt punk rock-jean troué et fait du skateboard entre ses rendez-vous. Elle enchaîne les séries mode et quelques publicités mais, angoissée par cette nouvelle solitude, les pressions du business et la nostalgie de son mode de vie plutôt rock, elle décide de redevenir elle-même avant de se conformer à ce que l’on attend d’elle, et se fait teindre les cheveux en rouge vif, un an tout juste après son arrivée. Un acte de rébellion qui angoisse ses agents sur le moment mais qui va devenir sa signature, son étendard. Tout comme ses piercings dans le nez et sur la langue. Gaultier, à qui elle tire la langue lors du casting, l’engage immédiatem­ent et lui demande de le faire à nouveau sur le podium. Suivront d’autres créateurs, dont quatre iconoclast­es visionnair­es : Karl Lagerfeld, Alexander Mcqueen, John Galliano et, plus étonnammen­t, Yves Saint Laurent qui posera même en 1995 avec elle, habillée d’un fourreau de satin rouge et velours noir dans son salon, devant Le Profil Noir de Fernand Léger, sous l’objectif de Jean-marie Périer. Sybil Buck casse alors tous les stéréotype­s, ouvrant la voie à d’autres beautés étranges. Toujours anticonfor­miste, elle quitte l’industrie de la mode en 1997 presque au pic de sa carrière et aménage à New York un loft en studio d’enregistre­ment. Après collaborat­ions et tournées, elle décide d’avoir un enfant avec le guitariste Chris Traynor, et Puma Rose naît à Brooklyn, dans un univers purement musical. Quand Puma fête ses 8 ans, Sybil déménage à Topanga Canyon, en Californie, et devient professeur émérite de yoga spécialisé­e en yoga thérapeuti­que. Puma, elle, est partie étudier il y a un an à New York mais reste très proche de sa mère, son modèle à elle. Pour boucler la boucle de cette transmissi­on, Sybil – venue spécialeme­nt à Paris – et Puma Rose ont défilé côte à côte pour Marine Serre, un passage initiatiqu­e, symbolique et un moment fort de mode, comme Puma nous le raconte depuis New York dans un entretien à bâtons rompus…

L’officiel : Qu’avez-vous ressenti en défilant avec votre mère pour Marine Serre ? Puma Rose : Ce fut un moment doux et spécial pour nous deux. J’admire tellement ma mère que ça me semblait juste de terminer ma première saison en marchant avec elle. Vous êtes-vous teinté les cheveux en rouge en hommage à la couleur légendaire de votre mère dans les années 90 ? J’aimerais pouvoir dire que j’y ai réfléchi, mais l’année dernière, dans un moment d’ennui, j’ai juste acheté une teinture pour avoir les cheveux roux. Dès que je me suis regardée dans le miroir, je me suis dit “et oui, c’est moi”. Je me sens absolument moi-même en rousse, et j’aime aussi l’idée de rendre un petit hommage à ma maman qui compte tellement pour moi. Y a-t-il une histoire derrière votre prénom Puma Rose ? Mes parents m’ont donné ce prénom en référence à Puma Jones, le chanteur et danseur du groupe de reggae Black Uhuru. Et Rose est le second prénom de ma tante. Quels sont vos premiers souvenirs liés aux backstages dans le monde de la musique ? Tous mes premiers souvenirs sont backstage ! Je suis en tournée avec mes parents depuis que je suis dans le ventre de ma mère. Mes souvenirs préférés sont ceux d’une tournée avec mes parents à San Francisco, où je me faufilais pour manger de délicieux plats chinois. Ou encore regarder mon père jouer depuis les coulisses, pour moi c’est le plus grand guitariste de tous les temps. Quels ont été les moments forts de votre première fashion week ? J’en ai tellement ! Le backstage de Matty Bovan m’a donné l’impression d’être dans un film d’aventures de science-fiction, avec toutes les filles portant de magnifique­s coiffes et d’immenses perruques à la manière de princesses extra-terrestres. Chez Miu Miu, je me suis sentie comme une princesse au bal ; j’étais complèteme­nt fascinée par la beauté de toutes les filles. Et chez Marc Jacobs, l’énergie était inégalée. On pouvait toutes sentir que nous faisions partie de quelque chose de plus important qu’un simple défilé. Je regardais les danseuses répéter en coulisses, émerveillé­e. C’était vraiment une expérience surréalist­e d’avoir la possibilit­é de travailler avec de telles légendes de l’industrie de la mode, comme la maquilleus­e Pat Mcgrath, une des femmes les plus douces que j’ai jamais rencontrée­s, ou le coiffeur Guido Palau qui m’a confection­né la plus magnifique couronne bouclée dont j’aurais pu rêver pour Miu Miu, ou encore Katie Grand qui m’a donné les looks les plus cool que j’ai portés. Quel est votre porte-bonheur ? J’en ai beaucoup. Le premier qui me vient à l’esprit est mon collier à breloques sur le thème de Jupiter. Jupiter est la planète de l’expansion, de l’optimisme et de la chance, qui sont mes trois principes directeurs. Ma mère et moi en avons des assortis. Comment définiriez-vous votre style ? En évolution constante, toujours confortabl­e, vintage et un peu androgyne. Que faites-vous à côté du mannequina­t ? Je compose beaucoup de musique et maintenant que je suis de retour à New York, je vais commencer à enregistre­r de la musique avec deux de mes amis. Nous prévoyons de jouer quelques concerts ici au cours des prochains mois. Je suis vraiment excitée. J’écris aussi toujours, j’écris dans mon journal tous les jours, de la poésie, de la prose ou simplement des pensées. Pourquoi avez-vous choisi New York et pourriezvo­us décrire une journée parfaite pour vous là-bas? Une journée parfaite à New York serait certaineme­nt une journée avec beaucoup de soleil, passée dans mon jardin préféré sur Elizabeth Street et à cuisiner beaucoup de bons petits plats. Avec les personnes que j’aime le plus. À propos de votre style de vie, êtes-vous une passionnée de yoga ? Êtes-vous végan? Je ne dirais pas que je suis accro, mais je fais vraiment beaucoup de yoga. C’est plus une pratique mentale que physique pour moi, je n’aime pas vraiment les cours très difficiles où l’on est en sueur. Il est très important d’avoir ce temps pour vérifier quotidienn­ement son corps et son esprit. Et non, je ne suis pas végan même si j’essaie d’être la plus végétarien­ne possible, pour la planète et pour les animaux. Mais j’aurais du mal à me passer des oeufs. Vous considérez-vous comme une féministe? Certaineme­nt, ce serait ridicule de vivre à notre époque et de ne pas l’être. Je pense qu’être activiste est impératif car les problèmes écologique­s et sociaux deviennent de plus en plus aigus. Qui est votre modèle ? En termes d’art et d’écriture, Patti Smith, j’aime aussi son style androgyne et son esprit à la fois vulnérable et sincère. Mais mes grands modèles seront toujours mes parents et ma grand-mère.

“Tous mes premiers souvenirs sont backstage ! Je suis en tournée avec mes parents depuis que je suis dans le ventre de ma mère.” Puma Rose Buck

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