Rendez-vous au terminus des beaux étés
Il y a Marie-Jeanne, Joseph et les autres. « Granville, Corsée, corsaire, chavirante » est un livre passionné et passionnant. A l’image de leurs auteurs.
L’un est un amoureux de la photo, l’autre de l’écriture. Au gré des images et des mots, Jean-Yves Desfoux et François Simon nous entraînent au coeur de Granville… Corsée, corsaire, chavirante, le titre de leur livre.
Originaire d’Avranches, Jean- Yves Desfoux, reporter photographe à Ouest France, se souvient très bien de la première fois où il a mis les pieds à Granville. « J’avais 16 ans, on venait de retrouver ma moto volée dans le port… » .
Trente-sept ans plus tard, il s’installe dans la Monaco du nord. Une ville dont il tombe totalement sous le charme. « A Granville, on a tout ! C’est une ville extraordinaire, par ses couleurs, ses habitants, son histoire, son esprit artistique » , explique le photographe, instigateur du projet.
« Ce n’est pas le côté carte postale qui m’intéresse »
Depuis cinq ans, appareil photo en bandoulière, il arpente chaque recoin de la ville, l’occasion, dit-il, de saisir des instants et des ambiances. Le prétexte aussi à la rencontre. Inspiré par les photographes Henri Cartier-Bresson ou encore Doisneau, qu’il a eu la chance de rencontrer, Jean-Yves Desfoux a pour terrain de jeu la rue et les gens qu’il affectionne. « Ce n’est pas le côté carte postale qui m’intéresse mais bien l’humain. J’adore la rencontre. La photo est un prétexte à tout cela » .
Avec son compagnon de route, un Fuji X100 de 250 gr, appareil télémétrique « qui passe inaperçu et qui ne fait pas de bruit » , il saisit le quotidien des personnages incontournables de la ville. Et ces « guides » entraînent notre photographe au-delà de ses espérances.
Au travers la focale de son 35 mm, on retrouve ainsi Marie-Jeanne qui tient le bistrot Le bon accueil dans le quartier Saint-Paul depuis 40 ans ou encore Joseph Bonnot, 92 ans, « le Gouverneur de la Haute-Ville » . « Ce personnage incontournable a les clés de presque toutes les maisons ! Tout le monde le connaît », se souvient Jean-Yves Desfoux.
L’artiste peintre Valérie Le Merrer, qui vient régulièrement à Granville, plage nord, pour peindre la mer, leur a aussi servi de guide comme tant d’autres artistes de la rue des Juifs.
Flâneries granvillaises
On retrouve tous ces personnages et bien d’autres encore au fil des 144 pages du livre. Celui-ci se décline sous forme de portfolios répartis en six thématiques : le patrimoine maritime, le balnéaire et l’élégance avec le Plat Gousset et le Jardin Dior, le festif avec le carnaval, la nuit des soudeurs ou encore les sorties de bain, l’historique avec la Haute-Ville, la flânerie granvillaise et les îles Chausey. «A l’époque je publiais une photo par jour sur Facebook et mes amis m’ont dit pourquoi tu ne ferais pas un livre. Il me fallait un texte d’accroche et c’est tout naturellement que je me suis tourné vers François Simon, journaliste, mon compagnon de cordée depuis trente ans » , explique le photographe.
La déclaration d’amour de François Simon
« Il y a beaucoup de tendresse dans ce livre pour cette ville qui est la plus anglonormande qui soit. Et puis la chance de Granville, sa matrice, son grain de beauté, ce sont les îles Chausey » explique François Simon. Descendu tout droit de Cherbourg où il vit, le grand reporter à la retraite depuis un an, s’est vite pris au jeu de ce nouveau challenge, essayant d’écrire des choses qu’il aurait aimé lire, dit-il. « Je ne voulais pas en faire un livre d’histoire, je voulais traînasser, flâner, bivouaquer… le nez en l’air. C’est un livre de géographie sensible. Il n’y a pas de mise en scène » . Collés aux images de Jean-Yves Desfoux, les mots de François Simon sonnent comme une évidence. Le « texte d’accroche » initialement prévu s’est ainsi transformé en une véritable déclaration d’amour. « C’est un port de la Manche qui en a sous le coude, un bout du monde, un terminus des beaux étés, le roc où l’on décroche et qui plonge son mufle dans le grand bleu. Qui vous retape un harassé en deux coups de cuillère à pot, où les visages pâles retrouvent des couleurs et les cabossés réapprennent le joli métier de vivre. On y cicatrise de tout un tas de choses. Le sel, sans doute… » écrit François Simon pour qui Granville restera cette ville qui a du chien et sait vous emporter le coeur. « Aussi modeste que talentueux ! » , affirme Jean-Yves Desfoux.
Jean-Yves Desfoux et François Simon seront au salon du livre de Granville ce dimanche 7 août.
Photo : Jean-Yves Desfoux et François Simon sont tombés sous le charme de Granville et nous le font partager. Marie-Jeanne tient le bistrot Le bon accueil depuis 40 ans dans le quartier Saint-Paul. On le surnomme « Le gouverneur de la Haute-Ville » , à 92 ans, Joseph Bonnot est un personnage incontournable.