La Gazette de la Manche

« Les moutons ne sont pas des Miss France ! »

Un débat a eu lieu, au cinéma Star sur l’élevage ovin mardi, 7, devant un nombreux public.

-

Stéphanie Maugé, bergère en pré-salé et Alain Gille Chaussats, chercheur, ont présenté leurs thèses sur l’évolution de l’élevage ovin dans La Manche, lors de la dernière séance de Ciné - Parlant. « Nous sommes à la fin d’une génération. Dans cinq ans, tous les enfants des Trente Glorieuses seront en retraite. Plusieurs fermes vont être en vente, mais, pour nous jeunes, le modèle économique proposé, par ces génération­s de l’après - guerre, ne nous convient pas ! » Stéphanie Maugé n’a pas sa langue dans sa poche. Cette Parisienne installée dans le Havre de Saint-Germain-sur-Ay, comme bergère, terme générique à laquelle elle tient, a décidé de sauver la race de moutons l’Avranchin. Rien que cela ! Cette jeune femme, dynamique, en fait voir aux Normands, pourtant connaisseu­r en la matière. Elle reprend. « Dans la Manche, le mouton est considéré comme un animal familier. Il y a un affectif des agriculteu­rs, des retraités, qui possèdent quelques bêtes » . Il n’existe pas de grands troupeaux d’ovins, comme on en trouve en Provence et dans les montagnes.

Les trois races de la Manche : L’Avranchin, le Cotentin et le Roussin sont le fruit de la vision agricole du XIXe siècle. Alain - Gilles Chaussat du Pôle rural de la Maison de l’Agricultur­e ajoute. « À l’époque, la diversité génétique est forte et les animaux évoluent en fonction des terroirs. D’où le développem­ent des races locales ovins, bovins, volailles…. Après la guerre, nous assistons à un phénomène inverse. C’est l’animal qui doit s’adapter à l’industrie » .

Stéphanie conteste cette vision productivi­ste de l’agricultur­e. « Les comices agricoles me font penser au concours de Miss France ! On sélectionn­e par rapport à un format, voulu par les abattoirs, les industriel­s. Les morceaux doivent entrer dans les barquettes en polyester, vendues dans le commerce. On est bien obligé de respecter ces standards, si on veut continuer à recevoir des subvention­s » . Le mouton de pré-salé, « moutons Irlandais » , comme les appelle, avec ironie, Stéphanie, reçoit, depuis des décennies, l’apport génétique des moutons du Royaume Uni. Stéphanie, « la Jeanne d’Arc des prés-salés » , veut bouter ces moutons Irlandais hors de Normandie et revenir à la race des origines, l’Avranchin. Mais les obstacles sont nombreux. Les éleveurs normands sont-ils vraiment motivés ? De son côté, l’Etat favorise plutôt les grands troupeaux. La Région, contrairem­ent à la Bretagne, beaucoup plus sensible à son patrimoine, n’accorde pas d’aides. Il est difficile de trouver de l’Avranchin en boucherie. La race n’est pas encore sauvée.

 ??  ?? De gauche à droite : Alain - gilles, chercheur, Stéphanie, bergère en pré -salé et Sylvain, président de Ciné-Parlant.
De gauche à droite : Alain - gilles, chercheur, Stéphanie, bergère en pré -salé et Sylvain, président de Ciné-Parlant.

Newspapers in French

Newspapers from France