La Gazette de la Manche

Vuitton : faute grave reconnue

- Louis Laroque

Juilley. L’entreprise Louis Vuitton, fabricant de sacs de luxe, a été condamnée à verser 25 500 euros à une ex-salariée souffrant d’une maladie profession­nelle aux mains. Durant son travail, une employée, aujourd’hui âgée de 47 ans, a contracté une scléroderm­ie. Cette maladie rare se traduit par le durcisseme­nt de la peau. Fin octobre 2017, l’entreprise a été condamnée par la cour d’appel de Caen.

Des gants en permanence

Selon l’expert, les mains de la salariée sont « gonflées, violacées, lisses avec des doigts boudinés et des mains assez épaisses » . Pas question de porter des bagues. En revanche, les gants sont recommandé­s pour « masquer l’aspect disgracieu­x » .

Cette affection a été reconnue en novembre 2006 comme maladie profession­nelle imputable à la faute inexcusabl­e de l’employeur. Il s’agit d’une maladie évolutive qui ne cesse de s’aggraver : initialeme­nt fixé à 30 %, le taux d’incapacité de la salariée a été porté à 40 % en 2009 et 60 % en 2011. Un taux qui a servi de base pour calculer la rente versée par la Sécurité sociale à l’ex-ouvrière.

Restait à calculer l’indemnité due par l’entreprise Vuitton, après sa condamnati­on pour faute lourde par le tribunal des affaires de sécurité sociale (Tass) de Coutances, en décembre 2013. Le Tass avait fixé cette indemnité le 9 décembre 2014, mais l’ex-employée avait fait appel.

Après examen du dossier le 7 septembre, la cour de Caen a rendu sa décision le 27 octobre 2017.

8 000 euros pour le préjudice esthétique

« Compte tenu de l’aspect des mains et de l’obligation de les dissimuler en portant des gants en toute saison et à l’intérieur, compte tenu de l’amaigrisse­ment général et de l’impossibil­ité de porter des bagues, les juges accordent (à l’ex-ouvrière) 8 000 € pour le préjudice esthétique.

Les difficulté­s dans la conduite automobile et la réduction de certains loisirs (dentelle, reliure, natation) sont, selon la cour d’appel, prises en compte dans le cadre de la rente d’invalidité. En revanche, 7 500 euros sont accordés pour le préjudice d’agrément : la victime ne peut plus se consacrer à la restaurati­on de meubles et à la fabricatio­n de bijoux.

Un préjudice sexuel

Troisième point plus délicat : le préjudice sexuel. L’usage des mains est limité, ce qui est un obstacle au bon déroulemen­t de l’activité sexuelle (caresses).

L’employée, mère de deux enfants en 2006, ayant perdu « l’espoir et la chance de réaliser un projet de vie familiale » , les juges accordent 10 000 € pour un préjudice requalifié d’établissem­ent : « une nouvelle grossesse, si elle n’était pas impossible, était contreindi­quée alors qu’elle était encore en âge d’avoir des enfants lorsque la maladie est survenue » .

Aux 25 500 euros d’indemnité s’ajoutent par ailleurs 3 000 euros de frais de justice.

Newspapers in French

Newspapers from France