La Gazette Val d'Oise

La témoin « poucave » et fait renvoyer le procès pour tentative d’assassinat

- Thomas HOFFMANN

Lundi 13 novembre, dans l’après-midi, la jeune femme de 23 ans quitte la barre de la cour d’assises de Pontoise avec le sourire et rejoint ses copines dans la salle en toute décontract­ion. Venue pour témoigner lors du procès pour tentative d’assassinat à la suite d’une fusillade à Garges-lès-Gonesse en août 2014, la demoiselle vient de tout chambouler en l’espace de quelques minutes en donnant le nom d’un individu qui aurait été présent le soir des faits, innocentan­t ainsi l’un des accusés. Une déclaratio­n qui a provoqué le renvoi du procès, la cour ayant demandé un supplément d’informatio­ns.

Depuis jeudi, Adama et Daouda C., deux frères, comparaiss­aient accusés d’avoir ouvert le feu à six reprises, à l’aide d’un calibre 8mm, sur un groupe de jeunes, le 20 août 2014, faisant trois blessés. Une expédition punitive qui faisait suite au meurtre de Sada, le frère d’Adama et Daouda. Si Adama a reconnu être le tireur, Daouda a toujours nié être celui qui se trouvait au volant ce soir-là, les deux jeunes refusant toutefois de donner le nom de cet homme. Un silence que les accusés ont gardé durant les trois premiers jours du procès.

« Il s’appelle Yacouba »

« Ça ne se fait pas de ’’poucave’’ », explique tout d’abord à la barre la jeune femme, ancienne petite amie de Daouda. Elle explique le silence des accusés par « la peur de représaill­es ». Mais elle, elle n’a pas peur et ne répond pas à la loi du silence qui prévaut dans la cité. Alors, après avoir assuré au sujet de Daouda « je sais que ce n’est pas lui et je sais qui c’est », la témoin tergiverse avant de finir par lâcher : « C’est son ami, à Adama… Il s’appelle Yacouba. » Stupeur dans la salle. La présidente poursuit ses questions, lui demande comment elle le sait. «Tout se sait. Je n’y étais pas. Mais ça parle beaucoup. C’est lui. » Son identité, elle l’a apprise après la sortie de prison de l’accusé, assure-t-elle. « C’est lui qui vous l’a dit », demande la magistrate. « Peut-être », répond la témoin. Et elle poursuit donnant le nom de famille de l’individu mais également des détails physiques. Elle indique également qu’elle a occupé, avec Daouda, un appartemen­t à Écouen loué par le frère de ce fameux Yacouba. Si elle reconnaît en toute décontract­ion être « une balance », les accusés restent, eux, toujours aussi silencieux.

« Il faut un supplément d’informatio­n. Il n’y a pas d’autre solution après ce qui a été dit », souligne l’avocat général. Un avis partagé par les conseils des deux parties. Un juge d’instructio­n a été saisi. Il devra entendre la jeune femme et identifier Yacouba afin de mener les auditions et les confrontra­tions pour rendre ses nouvelles conclusion­s avant le 30 juin 2018.

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