Trafiquante de drogue ou piégée par son mari ?
Tête pensante et chef du réseau comme l’ont désignée de nombreux trafiquants ou simple exécutante contrainte par un mari violent, comme Fanny s’est décrite ellemême ? Question que devaient trancher les magistrats au cours de l’audience, vendredi 14 avril.
Tout est parti de la découverte du corps d’une jeune fille de quinze ans dans un appartement d’Orléans, en mars 2008. Son décès suite à une overdose a déclenché une enquête qui a permis de démanteler une véritable organisation pyramidale avec des ramifications à Meaux, en Ile-de-France et en province. En fait, son estomac contenait 47 boulettes de cocaïne dont plusieurs s’étaient rompues. Ne pouvant la faire admettre à l’hôpital, elle avait été déposée là et abandonnée pour « crever à l’écart ».
Après la mise sur écoute de deux protagonistes orléanais, les enquêteurs ont réussi à identifier plus de quinze personnes impliquées et à les mettre sous les verrous. Des perquisitions ont été opérées qui ont permis de faire main basse sur 800 g de drogue. Ils ont pu localiser le point de départ du trafic basé à Saint-Martin, aux Antilles. Ils ont aussi établi que « des mules » se chargeaient de faire entrer la « cam » sur le territoire français en ingérant des bonbonnes, une méthode destinée à tromper la vigilance des Douanes. Parmi, les arrestations : celle de Fanny.
Fanny, déjà jugée en avril 2013 et condamnée à sept ans de prison et 40 000 € d’amende, a fait opposition au jugement et obtenu d’être rejugée.
Elle a connu Guadeloupe à Saint-Domingue où il travaillait comme conducteur de bus. À peine mariés, ils sont partis s’installer à Saint-Martin mais là, il a versé dans la drogue et son comportement s’en est ressenti. Il a profité que son épouse voulait rencontrer sa famille en France pour y importer sa marchandise et créer sa propre filière. Il a contraint Fanny à assurer le transport en la menaçant et en pratiquant le chantage au suicide.
Avec l’assistance d’une interprète de langue espagnole, elle a nié chaque déclaration à charge, y compris celles émises par son oncle et son frère. Elle n’a jamais voulu reconnaître le rôle prépondérant qui lui était assigné comme gestionnaire, organisatrice, recruteur, négociatrice… Son attitude a conduit le procureur de la République à résumer en une phrase la difficulté des magistrats : « Il est ardu d’appréhender ce dossier de plus de 2 000 pages ». Pourtant, il leur incombait de faire la part des choses, de définir le degré de responsabilité pénale de la prévenue, de la déclarer ou non coupable d’homicide tout en le qualifiant.
La démarche de Fanny a payé et sa peine a été minorée : relaxe pour plusieurs infractions, pas de responsabilité dans le décès de la jeune passeuse, quatre ans de prison avec maintien en détention et 20 000 € d’amende. Une satisfaction pour l’avocat de la défense qui avait plaidé : « le costume qu’on veut lui faire endosser est bien trop grand ».
« Le costume qu’on veut lui faire endosser est bien trop grand ! »