Oissery qui pleure, Paris qui rit…
En hommage aux résistants et soldats tués à la Libération lors de la bataille de l’étang de Rougemont, Oissery a célébré dimanche le 73e anniversaire des combats du 26 août 1944.
Dimanche 27 août, la brume étend son cocon blanc sur la plaine et l’étang qui servit de décor à la tragédie du 26 août 1944. En ce jour de commémoration des événements qui tuèrent 105 personnes, Oissery n’oublie pas.
Investi par Londres avec la mission de réceptionner un important parachutage de matériel, un groupe de résistants, le réseau Armand, venu du Rancy et de ses environs, dirigé par le commandant Charles Hildevert, y livra un combat tragique.
Un premier combat à Juilly
Un premier accrochage intervient après Juilly, au carrefour de Vinantes, avec un poste allemand situé dans un hangar à betteraves. Des tirs nourris sont échangés, des Allemands sont tués ou blessés, un résistant tué, un autre blessé.
En voulant contourner SaintSoupplets, une camionnette se ravitaille à Vinantes, où les hommes évitent de justesse un groupe allemand installé depuis la veille. Ils ont été alertés à temps par le maire du village. Le groupe croise un petit détachement allemand qu’il fait prisonnier, un général et un colonel sont capturés. Ils font une halte dans une râperie de betteraves entre Saint-Pathus et Oissery. Un poste d’infirmerie est improvisé pour soigner les blessés français et les prisonniers allemands.
Le massacre de l’étang de Rougemont
Le reste du bataillon se rend à l’étang de Rougemont, but de la mission, en compagnie des prisonniers, afin d’y attendre le parachutage. Dans une cuvette boisée, les hommes positionnent les fusils-mitrailleurs en batterie puis se cachent dans les talus et les bosquets sur les berges de l’étang.
Hasard malheureux. A peine sont-ils installés que les Allemands apparaissent. Avec leurs automitrailleuses, tanks, et grenades, ils prennent vite le dessus. Les soldats français sont vaillants mais c’est un massacre. Beaucoup sont abattus, les SS traquant le moindre rescapé, achevant les blessés, fusillant sur place ceux qui se rendent. Le commandant Hildevert et ses deux fils de 19 et 21 ans y laissent la vie.
105 victimes, 15 déportés
Entre-temps, la râperie a, elle aussi, été attaquée. Quelques hommes sont faits prisonniers, dont la majorité mourra en déportation. Les autres sont exécutés, placés dans la râperie ensuite incendiée. 27 corps carbonisés seront retrouvés dans les décombres. Au total, on dénombre 105 victimes tricolores, plus une quinzaine mourront en déportation.
Pendant ce temps, à Paris, le Général de Gaulle descend les Champs-Élysées, acclamé par une foule en délire, dans une capitale libérée.
Michel et Célia, petit-fils et arrière-petite-fille du commandant Hildevert, évoquent leurs souvenirs. Michel : « A la maison, on en parlait peu, presque jamais. La résistance et leur mort étaient une chose naturelle, loin de l’héroïsme. J’en ai davantage appris sur mon grand-père dans les livres qu’à la maison ». Il poursuit : « Je savais qu’il y avait des Allemands enterrés dans le jardin, mais c’était normal ». Sa fille écarquille les yeux : « Ça, je ne le savais pas ! » dit-elle surprise. La résistance n’a pas fini de livrer ses secrets.