La Marne (édition Meaux)

Une associatio­n pour briser le tabou du suicide des chefs d’entreprise

Depuis six mois, une structure accompagne les chefs d’entreprise­s seine-et-marnais pour éviter tout geste désespéré après une issue judiciaire. Une initiative qui permet des consultati­ons gratuites des patrons auprès de psychologu­es.

- Julien Van Caeyseele

Une oreille attentive pour éviter un drame. Depuis six mois, voici ce que propose l’Apesa 77 (Aide psychologi­que pour les entreprene­urs en souffrance aiguë), une associatio­n nationale qui dispose désormais d’une antenne en Seineet-Marne, dans les tribunaux de commerce de Meaux et de Melun. Mercredi 8 novembre, le Départemen­t, via sa branche Seine-et-Marne Développem­ent, a apporté une contributi­on de 5 000 € pour participer aux missions de cette associatio­n.

«C’est un dispositif qui a été créé en 20 12 en Charente-Maritime et qui part d’un constat réalisé dans tous les tribunaux de commerces, rappelle Jean Huault, le président de l’Apesa 77 et vice-président du tribunal de commerce de Melun. Le tribunal peut prononcer des décisions extrêmes comme une liquidatio­n judiciaire mais il n’y avait pas de réponse pour le chef d’entreprise, souvent au bout du rouleau après une telle décision. »

Concrèteme­nt, il s’agit d’un dispositif qui ambitionne de prévenir une issue fatale après une décision judiciaire, par exemple, le suicide du chef d’entreprise. Parmi les profils les plus fragiles : les patrons de TPE, de PME mais aussi des artisans ou encore des auto-entreprene­urs. « Des personnes qui travaillen­t seules et ne voient pas d’issue en cas d’arrêt d’activité », poursuit-il.

Déjà 45 alertes

En seulement six mois d’existence, 45 fiches d’alerte ont été réalisées pour des chefs d’entreprise de Seine-et-Marne. À partir du lancement de la procédure, l’associatio­n propose des séances gratuites au chef d’entreprise auprès d’un(e) des 43 psychologu­es affiliés à l’associatio­n.

« La décision judiciaire est une chose mais l’accompagne­ment après en est une autre, insiste Jean Gaillard, le président du tribunal de commerce de Melun. C’est une prise de conscience de difficulté­s que la justice ne peut pas gérer. »

Pour le départemen­t, une soixantain­e de sentinelle­s - réparties entre les deux tribunaux de commerce de Melun et Meaux - ont été formées pour détecter les fragilités. Magistrats, administra­teurs judiciaire­s et mandataire­s peuvent ainsi déclencher le dispositif. Une fois la fiche d’alerte réalisée, elle est envoyée à Nantes.

Un psychologu­e réalise alors un diagnostic par téléphone afin de déterminer le nombre de séances et redirige la personne vers un thérapeute seine-et-marnais. « Comme dans le monde de l’agricultur­e, la problémati­que du suicide pour des difficulté­s économique­s est réelle, même si elle ne semble pas pensable, souligne Olivier Morin, président par intérim de Seine-et-Marne Développem­ent. Nous avons souhaité accompagne­r cette initiative car il y a parfois des difficulté­s passagères mais aussi des souffrance­s profondes. » Grâce aux 5 000 €, l’Apesa pourra financer une vingtaine de rendez-vous de chefs d’entreprise avec des psychologu­es.

En Seine-et-Marne, 1 000 liquidatio­ns judiciaire­s ont été prononcées en 2016 et deux suicides de chefs d’entreprise ont par ailleurs été signalés dans le départemen­t. Mais d’autres issues violentes sont aussi constatées comme le meurtre présumé d’un employé, la semaine dernière à La ChapelleGa­uthier. Là encore des difficulté­s économique­s pourraient être à l’origine du drame.

 ??  ?? L’Apesa (Aide psychologi­que pour les entreprene­urs en souffrance aiguë) accompagne les chefs d’entreprise grâce à un suivi psychologi­que (©forestpath - Fotolia)
L’Apesa (Aide psychologi­que pour les entreprene­urs en souffrance aiguë) accompagne les chefs d’entreprise grâce à un suivi psychologi­que (©forestpath - Fotolia)

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