La Recherche

Nouveaux modèles d’évolution chez les vertébrés

- Mathias Germain

Les scientifiq­ues tentent de définir des lois universell­es pour modéliser l’évolution de l’arbre du vivant et comprendre l’origine de la biodiversi­té.

a Terre abrite plusieurs millions d’espèces. En fonction de leurs caractéris­tiques morphologi­ques, puis génétiques, les biologiste­s et les paléontolo­gues cherchent à classer cette biodiversi­té et à comprendre son évolution. Une question les anime en particulie­r : comment expliquer que certains embranchem­ents de l’arbre du vivant soient très diversifié­s alors que d’autres ne le sont pas ? Ainsi, dans le groupe des placozoair­es, minuscules animaux aquatiques, sans organes, composés de quatre types de cellules somatiques,

Lune seule espèce est répertorié­e. À l’inverse, le groupe des arthropode­s (comprenant insectes, araignées et crustacés) compte près de 1,3 million d’espèces… Pour John Wiens, de l’université d’Arizona, ces écarts de biodiversi­té dans les groupes du vivant s’expliquera­ient par deux facteurs : le taux de diversific­ation propre à chaque groupe et l’âge d’apparition de l’ancêtre commun à l’origine de ce groupe. Pour appuyer son hypothèse, il a calculé les taux de diversific­ation de la plupart des grands groupes qui constituen­t l’arbre du vivant : plantes, animaux, champignon­s, amibozoair­es, bactéries, archées… Il a ainsi montré que les taux de diversific­ation des plantes sont deux fois plus élevés que celui des animaux (1). « Ce travail tente de répondre à des questions passionnan­tes mais il comprend de sérieuses limites, souligne Fabien Condamine, de l’Institut des sciences de l’évolution à Montpellie­r. En prenant seulement en compte l’âge d’apparition d’un groupe et le nombre d’espèces existantes aujourd’hui, on néglige le fait qu’un groupe ait connu une explosion d’espèces pendant une période, et qu’ensuite ces espèces se soient éteintes pour ne laisser que quelques reliquats, comme chez les placozoair­es. »

CONTRAINTE­S NATURELLES

Même critique de la part d’Hélène Morlon, à l’Institut de biologie de l’École normale supérieure, à Paris : « L’expérience montre que les taux de spéciation et d’extinction des espèces dans un groupe ne sont pas du tout homogènes dans le temps. » Avec son groupe de recherche, elle tente d’avoir une vision plus précise de l’évolution avec des modèles probabilis­tes. Récemment, son postdoctor­ant Eric Lewitus a regroupé les données phylogénét­iques de 214 familles de vertébrés – mammifères, oiseaux, squamates, amphibiens, actinoptér­ygiens (*) –, couvrant une période d’évolution de 500 millions d’années. Il a constaté que sur des graphes à trois paramètres, ces 214 familles se regroupaie­nt en cinq grands modèles d’évolution (2). « Surtout, nous constatons qu’il existe des contrainte­s naturelles à la diversific­ation des vertébrés, explique Hélène Morlon. Cela s’illustre dans les graphes en trois dimensions par le fait que les représenta­tions des 214 familles n’occupent qu’un tiers de l’espace possible. »

(1) (2)

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Le placozoair­e est un petit animal (ici, 0,5 mm de diamètre) sans organes dont une seule espèce est répertorié­e à ce jour.

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