L’âge d’Homo naledi revu à la baisse
La datation des restes d’ Homo naledi rajeunit considérablement cet hominidé ancien découvert en Afrique du Sud, dont l’âge avait été estimé une première fois en 2015. Elle illustre la diversité de la lignée humaine.
Décrit en 2015 à partir de plus de 1 500 restes appartenant à 15 individus découverts au fond d’une grotte en Afrique du Sud, Homo naledi intrigue les paléoanthropologues (1). Au regard de ses caractéristiques morphologiques, l’équipe de l’université du Witwatersrand, à Johannesburg, qui a révélé l’espèce, avait estimé son âge entre deux millions d’années et 200 000 ans. Les paléontologues privilégiaient l’hypothèse la plus ancienne, mais ils n’avaient pas réalisé de datation, ce qui leur avait été beaucoup reproché. C’est désormais corrigé : Homo naledi a vécu il y a entre 335 000 et 236 000 ans (2). Pour obtenir ces analyses méthodologiquement irréprochables, les chercheurs ont confié des dents à deux laboratoires indépendants spécialisés dans la datation par désintégration de l’uranium. En parallèle, l’ancienneté des sédiments au contact des ossements a aussi été mesurée. Tous ces résultats convergent vers une date bien plus récente que ce qu’on imaginait. « Cette époque, le pléistocène moyen, est peu connue en Afrique, faute de fossiles nombreux, commente Sandrine Prat, paléoanthropologue du CNRS au Muséum national d’histoire naturelle. Les plus anciens fossiles d’ Homo sapiens datent d’il y a 200 000 ans, H. naledi et l’ancêtre d’Homo sapiens ont donc pu cohabiter. »
UN REGROUPEMENT MYSTÉRIEUX
Or les deux espèces ne se ressemblent pas. H. naledi est petit (moins d’1,5 mètre), son crâne a la taille d’une orange et son buste rappelle celui des australopithèques. « Mais certaines de ses caractéristiques évoquent aussi l’homme moderne, complète la paléoanthropologue. La morphologie de sa main suggère par exemple qu’il était capable d’utiliser ou de travailler un outil. » Selon l’équipe sud-africaine, on peut considérer H. naledi comme le survivant d’une lignée beaucoup plus ancienne. « Il illustre surtout la grande diversité des espèces humaines à cette époque, comme cela a été démontré pour des périodes plus anciennes. Jusqu’à l’extinction de Neandertal, il y a seulement 40 000 ans, plusieurs représentants du genre Homo ont toujours coexisté », remarque Sandrine Prat. L’équipe sud-africaine publie également la découverte de trois nouveaux individus H. naledi retrouvés dans une chambre voisine de celle où les premiers restes ont été mis au jour (3). Cette grotte recèle ainsi une rare concentration de restes anciens. « On pourrait imaginer l’existence d’un piège accidentel, explique Sandrine Prat. Mais le nombre important d’individus, dans deux chambres distinctes, semble indiquer plutôt un dépôt intentionnel des défunts. » Néanmoins, « on n’observe aucun élément à portée symbolique », note la chercheuse. Mesures d’hygiène ou de protection contre les prédateurs, les raisons de ce regroupement des morts restent donc mystérieuses. (1) L. R. Berger et al., doi: 10.7554/eLife.09560, 2015. (2) P. HGM Dirks et al., doi: 10.7554/eLife.24231, 2017. (3) J. Hawks et al., doi: 10.7554/eLife.24232, 2017.