UN TRAITEMENT INCONSCIENT DE LA SYNTAXE
Un mot écrit peut être identifié sans conscience. C’est ce qu’a montré l’équipe de Stanislas Dehaene, au centre NeuroSpin de Paris-Saclay. En effet, lorsqu’on flashe pendant quelques millisecondes un mot sur un écran, précédé et suivi de caractères aléatoires, les volontaires ne parviennent ni à identifier le mot, ni même à en deviner la présence. Pourtant, leur cerveau traite cette information subliminale. Les lettres sont identifiées et leur ordre est pris en compte. Le cerveau est ainsi capable de distinguer des anagrammes. Plus étonnant, il analyse la sémantique : si le mot a un contenu émotionnel fort, par exemple « viol », les régions du cerveau qui s’intéressent aux émotions s’activent. Dans des travaux plus récents, Stanislas Dehaene et son étudiante en thèse Lucie Berkovitch ont également mis en évidence un traitement inconscient de la syntaxe. Ils ont présenté des mots cibles à des volontaires qui devaient dire s’il s’agissait de noms ou de verbes. Avant chaque mot cible, un autre mot – l’amorce – leur était présenté pendant un temps très court (32 millisecondes). Tantôt cette amorce était visible, tantôt elle était précédée et suivie d’un cache qui la rendait subliminale. Résultat : lorsque l’amorce et le mot cible appartenaient à la même catégorie syntaxique, les volontaires réalisaient la tâche de catégorisation plus rapidement, même lorsque l’amorce était rendue subliminale. Cela signifie qu’un traitement non conscient de la syntaxe a eu lieu. Notre cerveau nous permet ainsi de nous focaliser sur le sens du message, plutôt que sur sa construction grammaticale.