Les grands crus bordelais liguŽs contre 1855.com
Début juillet, le Conseil des crus classés en 1855 et d’autres instances viticoles bordelaises ont révélé avoir déposé plainte contre le site 1855.com, il y a trois ans. Mais pourquoi lever le voile aujourd’hui ?
Pendant trois ans, le secret a été très bien gardé et ne devait nullement fuiter des murs de l’immeuble abritant les instances viticoles bordelaises. Ce n’est qu’en juillet dernier que le Conseil des crus classés en 1855, le Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux (CIVB), l’Union des maisons de négoce de Bordeaux et la Fédération des grands vins de Bordeaux ont finalement révélé avoir déposé plainte en 2012 contre le groupe de vente de vins en ligne Héraclès (1855. com, ChateauOnline et Cave Privée). Et pour cause, leur action en justice nécessitait la plus grande discrétion pour permettre au tribunal d’investiguer en toute liberté sur les activités des dirigeants du groupe Héraclès, Émeric Sauty de Chalon et Fabien Hyon.
Première à Bordeaux
La plainte enregistrée dès 2012 par le Tribunal de grande instance de Bordeaux pour pratiques commerciales trompeuses est associée à une autre plainte, pour escroquerie, déposée par 220 clients particuliers (lire La RVF n° 589, mars 2015). À la manoeuvre, l’avocate bordelaise, Me Hélène Poulou. Grâce à elle, pour la première fois dans les anales judiciaires, la filière viticole épaule l’action en justice menée par des particuliers !
L’objectif de leur démarche ? Déjouer la stratégie des dirigeants de 1855.com qui cherchent par tous les moyens à échapper à une lourde sanction judiciaire. En effet, la prescription pour les affaires financières n’excède pas trois ans. Estimant que ce type de plainte n’arriverait qu’après la liquidation judiciaire de l’entreprise, Émeric Sauty de Chalon et Fabien Hyon ont usé de tous les recours pour prolonger la période de redressement judiciaire (15 mois), avant la liquidation du groupe en janvier dernier. En agissant ainsi, ils estimaient que l’instruction se limiterait aux trois dernières années, soit sur une période durant laquelle l’activité du groupe Héraclès était déjà en berne.
« Mais en déposant plainte, dès 2012, cela a permis aux enquêteurs de remonter à trois ans avant le dépôt de la plainte, soit en 2009, au pic de l’activité de l’entreprise » , précise Me Hélène Poulou.
40 millions de dettes
Il s’agissait de déjouer la stratégie des dirigeants de 1855.com
L’instruction judiciaire permettra peut-être de répondre à l’une des questions centrales du scandale 1855.com : où sont passés les 52 millions d’euros qui ont financé l’entreprise, les 40 millions d’euros de dettes et les millions d’euros de bouteilles jamais livrées aux 11 000 clients ?