Que valent les 100/100 de Robert Parker ?
En accordant la note mythique de 100/100 aux vins qu’il jugeait exceptionnels, le critique américain Robert Parker a bouleversé le destin de nombreux domaines. Mais que valent aujourd’hui les “100 points Parker” dont le nombre ne cesse de croître alors qu
Bordeaux, lundi 29 juin 2015. Une effervescence inhabituelle gagne les paisibles bureaux de courtage bordelais. Par fax ou par e-mails, une poignée d’importateurs américains vient d’adresser les 24 pages de la dernière édition de The Wine Advocate, la lettre de Robert Parker. Et c’est désormais la course pour dénicher les derniers crus primés par le dégustateur le plus célèbre du monde.
En ce lundi matin, tous les marchands bordelais semblent heureux de revivre la fièvre qui s’emparait d’eux dans les années 2000, lorsqu’un vin décrochait la note suprême de 100/100 et se transformait illico en or. Mais en juin dernier, ces 24 pages de The Wine Advocate sont aussi pour le négoce bordelais, qui a peiné à vendre les 2014 en primeur, l’espoir de voir le marché des grands crus se redresser.
En ce lundi matin, la dernière mouture de The Wine Advocate est donc étudiée avec attention. Robert Parker y a mis à jour ses notes du millésime 2005 et publie dix ans après de nouveaux commentaires. Le grand millésime bordelais excite encore les convoitises. Et le critique, au fil des pages, a distillé les surprises. Certains crus, tels les châteaux Mouton Rothschild et Léoville Las Cases, ont vu leur note abaissée. Déception en Médoc, où aucun vin ne décroche la note suprême. En revanche, une pluie dorée de 100/100 s’est abattue sur la Rive droite. Château Angélus, Château Ausone, Château Lafleur… Pas moins de douze crus ont reçu l’onction suprême. Une véritable déflagration !
Toujours sous influence
Aussitôt, courtiers et négociants décrochent leur téléphone pour dénicher les caisses encore à vendre. OutreAtlantique, dès la publication des notes de Parker, la demande a explosé auprès des importateurs et des détaillants. « Cela a été de la folie, toute la matinée le téléphone n’a pas cessé de sonner. Et pourtant, les 2005 sont vendus depuis longtemps et les stocks sont rares » , témoigne François Lévêque, le président des courtiers de Bordeaux.
Pas de doute, donc : les 100/100 du plus influent des dégustateurs font toujours vendre. « Il demeure le seul critique dans le monde à peser aussi lourd sur les ventes de bordeaux » , poursuit le courtier.
Pourtant, depuis 2012, The Wine Advocate, le bimestriel indépendant et sans
publicité fondé par l’avocat Robert Parker en 1978, a changé de mains. L’Américain a revendu sa lettre pour près de 15 millions de dollars à un groupe d’investisseurs singapouriens, sans toutefois se retirer totalement. En effet, s’il a cédé son fauteuil de rédacteur en chef au profit de sa correspondante à Singapour, Lisa Perrotti-Brown, Parker conserve un rôle d’éditeur au sein de la publication et déguste toujours les vins de ses régions favorites, Bordeaux et la Californie.
Des changements en cours
Après le rachat de The Wine Advocate, les nouveaux propriétaires ont souhaité transférer le siège du bimestriel en Asie, nouvelle plaque tournante du marché des grands vins. Dans la foulée, ils ont projeté d’abandonner la version papier pour orienter The Wine Advocate vers une diffusion 100 % numérique. Mais, en 2013, Robert Parker a réussi à maintenir ses bureaux à Monkton, près de Washington, là où il réside, et surtout a obtenu que The Wine Advocate continue d’être diffusé dans sa version papier auprès de ses 50 000 abonnés. Pour autant, si Robert Parker a résisté à l’amicale pression de ses nouveaux propriétaires asiatiques qui cherchent à booster la rentabilité de cette pépite, bien des changements sont en cours.
Car aujourd’hui, “l’Oracle de Monkton” est devenu une marque à part entière. L’adresse du site internet de The Wine Advocate n’est-elle pas erobertparker.com ? Par ailleurs, depuis trois ans, les événements