Asphodèle 2018 du château Climens Un étonnant blanc sec né sur les terres de Barsac
Jean-Baptiste Thial de Bordenave et Jérôme Baudouin vivent tous deux à Bordeaux. Et justement, Jérôme Baudouin propose de déguster un blanc sec inédit, produit dans le Sauternais, au château Climens : il s’agit d’Asphodèle 2018, le tout premier bordeaux blanc sec élaboré par le cru classé de Barsac que dirige Bérénice Lurton.
JB. Jean-Baptiste, j’avais envie de te faire découvrir un blanc sec de Barsac. Plusieurs propriétés du Sauternais produisent de très beaux blancs secs, comme S de Suduiraut ou à l’étonnante cuvée Déclinaison du domaine de l’Alliance. Mais as-tu déjà entendu parler de la cuvée Asphodèle de Climens ?
JBTDB. Non, je suis surpris. Je ne savais pas que Climens produisait un vin blanc sec, finalement comme tous les crus classés de Sauternes aujourd’hui. Asphodèle, le nom est original et change des sempiternelles initiales des voisins, comme Y d’Yquem ou G de Guiraud.
JB. Ce vin n’est élaboré qu’avec les raisins issus de la propriété en biodynamie, ce qui à mon avis renforce le caractère si particulier du terroir de Barsac. Mais assez parlé, dégustons cette Asphodèle qui tire son nom d’un lys sauvage.
JBTDB. Le nez est très frais, iodé, zesté, avec des arômes d’anis, de pêche blanche, de poire et de jolies notes d’acacia. En bouche, je suis étonné par son corps enveloppant mais tendu en finale. C’est très bon. C’est un sémillon très précis, sans lourdeur.Surprenantcarcecépageestrarement aussi précis en bouche. Je ne sens pas le bois !
JB. Bien vu : l’autre particularité de ce blanc sec est qu’il a été élevé en cuves. Il n’a jamais été en contact avec le bois.
JBTDB. Du coup, nous n’avons pas les notes d’élevage qui ont tendance à maquiller les arômes de fruits et du minéral. Il y a un côté chaleureux, l’acidité est parfaitement maîtrisée. J’aime son équilibre souverain.
JB. Et puis, il possède un côté cristallin, comme le grand liquoreux de Climens. Il y a une filiation : même précision dans les arômes, même minéralité qui cisèle le vin en finale. Jemedemandesilabiodynamien’influencepascettetension qui confère à ce blanc son profil élancé ? Je te sens séduit ! Mais te projettes-tu dans le Bordelais en goûtant cette cuvée ?
JBTDB. Franchement, non ! À l’aveugle, je ne situerais pas ce blanc à Bordeaux. J’irais plutôt dans la Loire, du côté de Saumur, avec le chenin. Avec un peu d’âge, je ne serais pas étonnéqu’ilnousemmèneenBourgogne,àMeursault.Ce vin est vibrant et nous fait voyager ! Il est déjà délicieux.
JB. Je trouvais d’autant plus intéressant de te le présenter car pour moi il réhabilite les grands blancs secs de Bordeaux. Nous ne sommes pas dans le registre de ces blancs boisés, souvent fatigués après quelques années. Malheureusement, les dérives de sous-maturation et de surmaturation de ces trente dernières années n’ont pas incité les amateurs à se laisser séduire par les blancs secs bordelais.
JBTDB. Contrairement au sauvignon, le sémillon développe avec le temps un côté fumé, en témoignent les grands blancs des années 80 signés La Mission Haut-Brion, Fieuzal et domaine de Chevalier, qui comptent une bonne part de sémillon. Cette cuvée me renvoie aussi vers ces vins. Incontestablement, c’est un très grand blanc. Sais-tu combien cette bouteille est-elle vendue ?
JB. Un peu moins de 30 euros au château.
JBTDB. À ce prix-là, je vais tout de suite filer à Climens pour en acheter une caisse et le faire découvrir à mes amis.
JB. Je ne peux que t’encourager à le faire car j’ai aussi goûté le 2019, et je dois t’avouer qu’il me semble un cran au-dessus. La propriété a parfaitement su traduire son style dans cette cuvée Asphodèle. •