Faux bordeaux en Chine La longue marche du CIVB
Une première victoire pénale sur des lots de fausses bouteilles a eu lieu avant l’été à Shanghai. Le résultat de dix ans d’un travail de fourmi.
Deux mois après un jugement historique du tribunal de Pudong (district de Shanghai), les Bordelais sont plus que jamais à l’offensive pour confondre les puissants réseaux de contrefacteurs chinois. « Nous avons une douzaine de procédures pénales en cours, des affaires très avancées, le jugement de juin est une grande première et va nous aider, c’est une jurisprudence précieuse » , souligne Fabien Bova, directeur général du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux( CI V B ), l’ homme qui traque les fausses bouteilles en Chine.
Fin juin en effet, un opérateur a été pour la première fois condamné pour « contrefaçon d’une marque déposée » à dix-huit mois de prison et 19 500 euros d’amende : il avait présenté de faux bordeaux à la foire internationale de Chengdu. Ce célèbre salon annuel symbolise à lui seul l’énorme trafic de faux qui pèse sur les exportations de bordeaux : dans les hôtels qui entourent le palais des congrès, FabienBo vase souvient avoir vu des chambres vidé es des es meubles et transformées en sites d’expositions “off” où les contrefacteurs présentent publiquement leurs produits !
SENSIBILISER LA POLICE LOCALE
Les Chinois copient tout, avec une prédilection pour les produits en vogue. Depuis l’ explosion des ventes de vins fins en Chine voici quinze ans, Bordeaux est en première ligne: des filières importent des jus chiliens en masse et les mettent en bouteilles estampillées “Bordeaux” (avec nom de château usurpé, modifié ou inventé) dans des usines dédiées sur la côte. Un trafic beaucoup plus important en volume que les faux Lafite ou Pétrus. Il a donc fallu près de dix ans aux Bordelais pour parvenir à sensibiliser les autorités chinoises à la notion de protection d’indication géographique, et collaborer activement avec la police.
« Au départ, personne là-bas ne comprenait où était le préjudice, la justice chinoise ne connaît pas de notion de protection de terroirs, seules les protection de marques existent » , se souvient Fabien Bova. Ses équipes ont dû effectuer un travail de fourmi pour déposer entant que marques la cinquantaine d’ appellations bordelaises, mais aussi expurger du dépôt légal les labels déjà enregistrés par les contrefacteurs, car ceux-ci faisaient protéger les mentions qu’ils usurpaient ! La seule appellation Margaux, très appréciée, avait ainsi été déposée 147 fois par des faussaires un peu partout à travers le pays.
Bordeaux revient de loin, car les polices locales sont maintenant formées aux notion de protection de marques collectives étrangères et commencent à traquer eux-mêmes les délinquants chinois. Pour les autres, le CIVB continue à repérer les faux sur les salons ou sur Internet, identifier les contrefacteurs, repérer leurs sites de production, faire constater la fraude, etc. Un vrai boulot de détective! B. S.