Nos ventes de vin dévissent à l’étranger
Avec la crise mondiale du Covid-19, les vignerons tricolores n’ont qu’une peur : revivre un nouveau millésime désastreux à l’export comme 2009.
2020, annus horribilis pour les très profitables ventes de vins français à travers la planète ? Les dernières données enregistrées par les Douanes sont à la hauteur de la crise : pour le premier semestre, les exportations de vins ont reculé de 21,6 % en valeur (jusqu’à - 28,3 % pour les effervescents). Toutes les régions, sans exception, sont dans le rouge, avec un triste record pour Bordeaux
(- 31,5 % de ventes).
Le choc est d’autant plus rude que notre vignoble, premier exportateur mondial en valeur, signait record sur record depuis une décennie. L’an passé, la France avait expédié pour 9 milliards d’euros de vins, dont un tiers de champagne. Si la tendance se confirme d’ici à fin décembre, la viticulture pourrait donc se priver de… deux milliards d’euros de ventes.
Taxes Trump, crise à Hong Kong, Brexit et bien entendu crise du Covid-19, il n’a fallu que quelques mois pour que la situation se retourne complètement. « Tout le monde espère que nous ne revivrons pas la désastreuse année 2009, suite à la crise mondiale des subprimes, et d’ailleurs nous n’en sommes pas encore là », tempère LouisFabrice Latour (Maison Louis Latour), vice-président de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux.
UNE RENTRÉE SOUS TENSION
Certaines zones résistent encore à l’effondrement, comme les vignobles d’Alsace, de Provence, de la Vallée du Rhône et de Bourgogne. « Nous tenons encore le coup, c’est du repli en bon ordre », explique Louis-Fabrice Latour pour sa région d’origine (sa propre entreprise limite pour l’instant la casse à - 10 %). Par ailleurs, les labels tricolores les mieux installés bénéficient d’une prime en temps
de crise. « Les grandes marques comme la nôtre résistent naturellement mieux », admet Philippe Guigal, dirigeant de la fameuse étiquette rhodanienne (- 8 % à l’export chez E.Guigal pour l’instant). Une consommation soutenue et de bonnes ventes cavistes pendant les périodes de confinement étayent effectivement cette thèse.
Toutefois, chacun sait que la rentrée sera rude. Problème central : les faillites de restaurants, une des principales clientèles pour l’export. « C’est un tiers de notre chiffre d’affaires, nous sommes très inquiets », admet Philippe Guigal, informé par exemple que 60 % des établissements québécois pourraient mettre la clef sous la porte d’ici décembre.
Et à cette satanée taxe Trump prolongée de six mois. « C’est l’autre principale inquiétude, nous ne vendrons pas longtemps nos grands vins un tiers plus cher », reconnaît Louis-Fabrice Latour.