Rivesaltes : la cave coop se mutine contre la prison
À Rivesaltes, un projet de maison d’arrêt de 500 détenus devant la cave coopérative Arnaud de Villeneuve provoque l’ire des vignerons.
Les 220 coopérateurs de la cave Arnaud de Villeneuve à Rivesaltes devront-ils vendanger demain en traversant les parloirs sauvages de familles communiquant avec les détenus de la future prison ? Depuis novembre et ce projet de maison d’arrêt qui barre l’avenir de la coopérative, le monde vigneron est en émoi.
Selon l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ), le bâtiment doit être construit en 2023 dans la zone d’activité du mas de la Garrigue, sur une parcelle mitoyenne de la cave (3,5 millions de bouteilles). « Mi-novembre, on nous a annoncé la construction d’un petit village de 500 détenus collé à notre site. Pour les autorités, tout est déjà décidé », s’indigne son président, Brice Cassagnes.
Ce « petit village » est en réalité une cité de 14 hectares, ceinte d’un mur de six mètres de haut et de 350 de long, comprenant aussi des studios pour les familles des détenus. 450 véhicules sont annoncés par jour. De quoi compliquer la cohabitation entre les deux bâtiments. « Les bennes de vendanges croiseront les usagers de la prison, une aberration en termes de flux logistiques », dénonce le directeur de la cave, Jean-Pierre Papy.
Et les problèmes de sécurité ? Lors d’une visite du site, en février, les responsables
de l’APIJ ont découvert 32 cuves surmontées de passerelles, à 12,50 mètres de hauteur. « Une position idéale pour lancer des projectiles ou faire passer des messages vers la prison », grince Brice Cassagnes. Et que dire des conséquences négatives pour l’image des vins de Rivesaltes ?
BASCOU, LE POMPIER PYROMANE
Pour les coopérateurs, c’est l’incompréhension : 12,5 millions d’euros ont été investis en 2007 pour implanter la coopérative sur ce site, avec un crédit-bail de la communauté de communes, alors présidée par André Bascou, maire de Rivesaltes. « Il a joué au pompier pyromane, il prétend nous défendre mais il a proposé le terrain à l’APIJ », déplore Jean-Pierre Papy.
Devant le désengagement des élus locaux, les viticulteurs ont frappé à la porte du gouvernement. Dans son courrier du 5 mars, le Garde des Sceaux ne les a pas spécialement rassurés. Pour réduire la « co-activité », Éric DupontMoretti évoque « différents scénarios d’implantation sur le site ». Sur le site ? Les viticulteurs, eux, préféreraient voir la prison bâtie sur le camp militaire de Rivesaltes (600 hectares), propriété de l’État. Ils le jurent : ils ne « céderont rien ! »