La République de Seine-et-Marne (Édition A-B)

Josette Baïz : « Ces artistes ont DANSE. révolution­né la danse contempora­ine » CHANSON. Camille à Sénart

- Uprising, Alice Alice, Propos recueillis par Vanessa RELOUZAT Tarifs : de 23 à 32 €. Renseignem­ents au 01 60 34 53 60 ou theatre-senart.com.

La troupe Grenade composée d’enfants et d’ados sera bientôt sur la scène du ThéâtreSén­art. Vingt ans de danse sous la houlette de la directrice artistique Josette Baïz.

Ils ont entre 7 et 18 ans. Ils ont reçu une formation de danse pluridisci­plinaire et parcourent le monde. Sept chorégraph­es de renommée internatio­nale leur ont confié des extraits de leurs pièces. Et les jeunes danseurs se les approprien­t avec une maîtrise technique extraordin­aire et une joie communicat­ive. Le résultat d’une pédagogie, celle de Josette Baïz, la directrice artistique, qui propose « Guests 1 », au Théâtre-Sénart, à Lieusaint, les 3 et 4 octobre prochains. Interview.

À travers ce spectacle, vous rendez hommage à 7 grands chorégraph­es internatio­naux. Qu’est-ce qu’un grand chorégraph­e, selon vous ?

Quand on a Lucinda Childs, l’une des trois plus grandes chorégraph­es de la planète, la question ne se pose même pas. Pour des jeunes, c’est formidable. J’aime bien partir de chorégraph­es des années 1970/80, qui ont marqué une époque, et aller vers des émergents comme Wayne Mc Gregor, ce sont aussi de grands chorégraph­es. Ces artistes ont révolution­né l’art de la danse contempora­ine. Lucinda Childs a amené une de géométrie sur le plateau. Je pense que ce sont de grands chorégraph­es mais après c’est l’histoire de la danse qui le dira.

Qu’est-ce qui vous a touché, personnell­ement, chez ces jeunes chorégraph­es ?

Chez Mc Gregor, c’est l’alliance entre la danse classique dans les jambes et, en même temps, une déstructur­ation du buste qui est très étonnante et nouvelle par rapport à la base de danse classique. Il propulse une formidable énergie. Et il y a une mise en espace, c’est une danse qui est très révoltée. Ces veines artistique­s arrivent sont extrêmemen­t intéressan­tes. Ce qu’a amené Mc Gregor, c’est neuf et c’est très dynamique. Hofesh Shechter encore plus. Dans le bassin des danseurs est à 20 cm du sol. C’est complèteme­nt fou. Son travail au sol, sa matière est très nouvelle. Les nouveaux chorégraph­es basent leurs recherches sur le fait que le corps doit pouvoir changer de matière. On peut avoir fait 20 ans de danse et être incapable de faire un Shechter. Le corps est bousculé dans tous les sens. Il est toujours conscient de son poids. C’est formidable de voir la différence entre une Lucinda Childs où tout est dans

le saut, dans les piqués, dans une folie spatiale. Et les nouveaux chorégraph­es qui sont, eux, proches du sol, et proche du contact.

C’est peut-être l’époque qui veut ça. Un besoin de se reconnecte­r peut-être ?

Absolument. On retrouve quelque chose d’humain avec ce travail. On est conscient de l’autre. On se fond dans l’autre. Tout est en portés.

De même, qu’est-ce qu’un bon danseur, selon, vous ?

C’est celui qui a le mental aussi ouvert que le corps. Quand il va commencer à danser, il va être capable d’écouter son chorégraph­e. La formation que je donne aux danseurs n’est pas académique dans le sens où même s’ils font du classique, du contempora­in, du hip-hop, au bout du compte, par l’improvisat­ion, la compositio­n, ce qu’on va chercher, c’est l’ouverture. Cela nécessite de n’avoir pas trop d’ego et surtout d’être en communicat­ion, en respect par rapport aux autres, aux chorégraph­es. Avec ma pédagogie, on parvient à faire des choses extrêmemen­t difficiles et éloignées. Dans un programme, on peut avoir du néoclassiq­ue et des nouvelles énergies.

Est-ce que c’est plus enthousias­mant de travailler avec des enfants et d’arriver à un tel niveau ?

J’ai plus de facilité avec les petits qu’avec les grands parce que les enfants ont cette ouverture justement. Ils sont tellement plein d’admiration et d’envie, qu’en échange, on a envie de leur donner quelque chose. Certains sont clairement des ovnis, mais on peut avoir des enfants qui n’ont pas un niveau technique insensé. Ils sont cependant tellement ouverts, qu’ils vont trouver un chemin pour arriver à exécuter des passages difficiles, des acrobaties, Et puis les enfants savent improviser. Ils donnent une autre lecture de l’oeuvre. Et c’est ça qui intéresse les chorégraph­es.

Ça fait 25 ans que vous avez créé le groupe Grenade. Est-ce qui est le plus difficile d’amener les enfants à la danse aujourd’hui ?

C’est plus difficile dans les quartiers. Pour les autres non. Énormément d’enfants aiment la danse. À côté d’Aix en Provence, les écoliers voient nos spectacles et viennent nous voir à la sortie en nous disant qu’ils veulent aussi le faire. Certains ont même forcé leurs parents à déménager. Avec Grenade, on a créé un métissage de cultures chorégraph­iques. On a mélangé toutes nos danses : le hip-hop, le classique, le contempora­in, la danse orientale, la danse africaine. Ça a donné une forme de danse qui a rencontré beaucoup de succès. Dans les quartiers, on est un peu en réaction inverse. On a plus de mal à les canaliser. C’est tellement dur la danse. Ils s’entraînent dix heures par semaine, en plus de l’école, sans compter les tournées. C’est vraiment difficile pour eux de tout mener de front. Dans les quartiers, on résiste mais c’est dur.

Pourquoi avez-vous choisi de reprendre le thème d’Alice au pays des merveilles ?

Après, Ulysse, Oliver Twist, l’enfance en souffrance est un thème qui revient souvent chez moi. J’essaye de dire des choses plus intérieure­s, plus refoulées et qui montrent un autre visage de l’enfance. Quand on lit entre les lignes, il s’agit d’un voyage extrêmemen­t inquiétant. Elle passe par des stades difficiles. Disney le traite avec humour. Je ne voulais pas en faire une comédie.

Est-ce que cela vous permet de transmettr­e davantage d’émotion ?

Le maître mot, c’est l’émotion, en effet. Il suffit de voir ce qu’il se passe dans le monde pour comprendre que l’enfance, ce n’est pas simple tous les jours. Je suis bouleversé­e par ce qu’on voit partout. Du coup, je me sens investie d’une mission. Par contre, je ne dis pas qu’un jour je ne vais pas faire l’inverse pour aussi emmener les enfants dans quelque chose de très gai, de sorte que le spectateur ressorte avec un grand sourire et l’envie de danser.

Est-ce que le danseur réalise aussi un parcours initiatiqu­e, comme Alice ?

Exactement. On parle d’Alice, on lit on s’interroge sur chaque scène. Forcément, ils sont obligés de faire un parcours initiatiqu­e. Le danseur va passer une audition, il se remet perpétuell­ement en cause. Et ça, je trouve que c’est très sain. La technique ne fait pas tout. Loin de là.

L’inclassabl­e Camille est de retour avec un nouvel album « OUÏ » qu’elle présentera au Théâtre Sénart le vendredi 29 septembre à 20 h 30. Voilà plus de quinze ans que cette éternelle jeune fille déploie son énergie hors sol. À chacune de ses apparition­s, Camille nous surprend avec, non pas sa voix, mais ses voix rythmées par les percussion­s et le piano. Elle nous offre des chansons qui se jouent des règles pour nous inciter à jouer. Des chansons qu’on reprend à

gorge déployée dès la pre- mière écoute. Des chansons qui ont remporté une multitude de Victoires de la musique, rempli les Zéniths et fait pleurer plus d’un dur à cuire. Des chansons qui ont fait de la poésie le plus beau des messages politiques. Camille a mis cinq ans à publier un nouvel album, une éternité dans ce monde d’immédiatet­é digitale, un battement de paupières pour la chanteuse.

« Un parcours initiatiqu­e »

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En reprenant le thème d’Alice au pays des merveilles, Josette Baïz explore les souffrance­s de l’enfance
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Camille

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