L’édito de François Sapy
Une fois de plus, nous avons assisté en début de semaine à la pire expression de l’indigeste millefeuille territorial français. Pour des raisons électoralistes assumées, le président du conseil départemental du Rhône Christophe Guilloteau continue de ferrailler vaille que vaille contre l’A45, véritable serpent de mer qui pourrait, aux dernières nouvelles, être achevée en 2022. Rappelons que cette autoroute doit permettre – si l’on arrive à mettre un terme à cinquante ans de tergiversations– de remplacer la calamiteuse A47 entre Lyon et Saint- Étienne. Ceux qui fréquentent quotidiennement ce « machin » ( ce n’est pas mon cas, mais nous connaissons tous un grand nombre d’usagers qui s’en désespèrent) savent à quel point cette voie rapide, accidentogène et saturée, est nocive à tous les niveaux : pollution due aux bouchons, risques pour les conducteurs, coût des innombrables ralentissements pour la collectivité et le tissu économique…
Or, il se trouve que le président du conseil départemental du Rhône, comme l’un de ses éminents prédécesseurs Michel Mercier, est contre. Il est contre, parce que cette infrastructure traverse une zone à fort potentiel électoral. Il l’a de nouveau affirmé lorsque Laurent Wauquiez, le président de la Région, a annoncé son intention de contribuer à hauteur de 140 millions d’euros au chantier de l’A45 ( le vote est prévu le 7 juillet). Le tout, après une énième étude qui sou- ligne la nécessité de choisir l’option d’une nouvelle autoroute plutôt que celle consistant à réhabiliter l’A47. Dommage que le président d’une grande collectivité comme le conseil départemental du Rhône choisisse de défendre les intérêts particuliers de certains de ses électeurs plutôt que l’intérêt général de son territoire.
Attention danger : les collectivités vont devoir suivre le dossier Mérial comme le lait sur le feu. Rappelons que Mérial est le leader mondial de la santé animale et que son siège est à Lyon. Cette société a été l’un des tout premiers fers de lance de l’empire de la santé bâti par les Mérieux. C’est d’ailleurs l’une des dernières divisions à porter encore partiellement le patronyme de cette famille d’entrepreneurs emblématiques de la région. Or, la cession par Sanofi de Mérial au groupe allemand Boehringer Ingelheim présente des risques gigantesques pour le territoire. Si ce groupe s’engage dans une logique de transfert des centres de décisions de Mérial hors de la Métropole, ce sera catastrophique pour notre territoire. Je ne suis pas franchement pour une économie administrée, mais il y a des moments où les collectivités doivent jouer de la carotte et du bâton pour empêcher le marché d’agir à sa guise. C’est donc maintenant qu’il faut montrer les muscles, agiter la carotte et le bâton. Car après, il sera trop tard.