Bruno Genesio, l’homme qui ne changeait pas
Pour lui, tout a changé. Propulsé entraîneur l’hiver dernier avec pour mission d’éteindre l’incendie dans la « Maison OL » , Bruno Genesio s’est subitement retrouvé à un poste à haute pression et médiatiquement surexposé. Mais si l’ancien adjoint a changé de statut, l’homme est resté le même : un « vrai » Lyonnais, chaleureux et jovial… avec plus de poigne qu’il peut en laisser paraître.
« On aurait pu croire qu’il allait changer. Mais Genez’ reste Genez’ » . Le commentaire est signé de l’ancien attaquant Sidney Govou, et partagé unanimement par l’entourage de Bruno Genesio. Nommé coach de l’OL le 24 décembre dernier, il a pourtant basculé dans un nouveau monde. Le cadeau de Noël du président Aulas a propulsé, du jour au lendemain, l’ex- adjoint à un poste en première ligne. Et les signes extérieurs de ce changement radical de statut sont nombreux : désormais, il fait la Une de L’Équipe, on le reconnaît dans les rues de Lyon… Mais tous ses proches le répètent, à l’image de Bernard Lacombe : « Bruno n’a pas
changé, et il ne changera pas. Point. » Ce qui veut dire, pêle- mêle, que le coach de l’OL est « quelqu’un de pétillant » ( son adjoint Gérald Baticle), « un vrai déconneur à l’humour très fin » ( Sidney Govou), « un type franchement sympa, très chaleureux » ( un
journaliste), « un personnage tout en rondeurs » ( un employé du club). « Quand on discute avec lui, on n’a pas l’impression qu’il occupe un poste avec autant de pression et de médiatisation » , résume Aymeric Blanc, le directeur du magazine de foot Planète Lyon. Lorsqu’on a rapporté ces propos à l’intéressé, le 5 septembre, on a senti chez lui une vraie satisfaction. « Je suis content que les gens s’en rendent compte, et surtout content de ne pas avoir changé. Je mesure tous les jours que mon métier est très exposé, mais je ne veux pas me comporter différemment. En tout
cas, j’essaie » . Bruno Genesio aurait pourtant légitimement de quoi prendre un peu le melon. Lui, le « vrai » gone, Lyonnais « Canal historique » rentré au club à l’âge de 5 ans, qui a porté le maillot frappé du Lion pendant dix saisons chez les pros
( lire page suivante), se retrouve à la tête de l’équipe première. Il aurait, dit- il, « sûrement été un Bad Gone » s’il n’avait pas fait carrière dans le foot, le voilà chef d’orchestre pour la première campagne de Ligue des Champions dans le nouveau stade.
« Ce poste, c’est la chance de sa vie » , souffle un observateur. Mais surtout, les résultats sont là : il hérite à la trêve hivernale d’une équipe qui a la tête dans le seau, et réussit l’exploit de la propulser à la deuxième place à la fin du championnat au printemps dernier. Suite logique, le président Aulas transforme sa mission d’intérim de six mois en un CDD de trois ans au poste d’entraîneur. Pourtant, Bruno Genesio ne fanfaronne pas : « Je garde les pieds sur terre parce que ce métier demande beaucoup d’humilité. Vous savez, je peux passer en trois jours du magicien qui bat Paris au nul qui perd contre Guingamp. Avec tout le respect que j’ai pour Guingamp » . Une vraie tirade de footeux, mais qui contient sa part de vérité. La preuve : après deux défaites de rang en championnat à Dijon et face à Bordeaux, le coach vient d’entrer dans une zone de turbulences…
D’abord des critiques Surtout, Bruno Genesio n’a pas oublié les commentaires globalement sceptiques à son arrivée. Les observateurs qui pointaient son manque d’expérience d’entraîneur au plus haut niveau, et les supporters qui espéraient un nom plus ronflant. C’est vrai que son CV était plutôt maigre, avec une dernière expérience d’entraîneur principal qui s’est soldé sur un échec, en 2005, avec Besançon en quatrième division. Une pétition contre sa nomination a même circulé sur Internet. Bref, il ne
« C’est là que tout se passe ! »
faisait pas rêver. « Je ne vais pas dire ça fait plaisir, j’ai été touché. Mais j’ai compris les réflexions d’une partie du public qui attendait quelqu’un
de plus expérimenté » , rembobine- t- il. Mais s’il n’a pas les références, Bruno Genesio a pour lui une connaissance des moindres recoins de la « Maison OL » , qu’il décrit comme
« l’histoire de ma vie » . Très proche d’Aulas et de Lacombe, il réintègre le staff lyonnais juste après son aventure bisontine. D’abord auprès des jeunes, ensuite en numéro 2 de Rémi Garde puis d’Hubert Fournier. Autant dire qu’il connaît par coeur les codes de l’institution. En somme, le portrait- robot du pompier de service, capable de reprendre l’équipe en cours de saison sans période d’adap-
tation. « Si je suis là, c’est parce que des gens sensés m’ont nommé. L’OL compte parmi les meilleurs clubs en France et en Europe, et beaucoup de monde aimerait être à ma place. En ce sens, j’ai de la chance. Mais c’est bien que je devais le mériter quelque part… » , appuie- t- il. Et, ce qu’il ne digère vraiment pas, c’est que ce procès en légitimité continue maintenant. « Comme je n’ai pas une carrière de grand joueur, j’aurai toujours plus à prouver. Je le vois bien aujourd’hui, même si on a fini deuxième, il y a toujours des “Oui mais ” à mon sujet : “Oui mais il a bénéficié de circonstances favorables jusqu’à mainte- nant ”, “Oui mais cette année, ce sera plus dur ”… J’avoue que ça m’énerve parfois » .
Bouille franchouillarde Pourquoi ce doute qui persiste ? Sûrement parce que Bruno Genesio n’a pas non plus le charisme naturel d’un José Mourinho. Avec son allure de prof’ d’EPS et sa « bonne bouille franchouillarde et son oeil rieur » , dixit son adjoint Gérald Baticle, le monde extérieur a du mal à percevoir en lui un meneur d’hommes. D’autant plus qu’il reconnaît « ne pas aimer aller au
conflit » . Mais attention aux apparences trompeuses. « Il faut vraiment