Le bar- tabac de l’espoir
Faut- il rire ou pleurer de l’évolution de notre économie ? Deux événements de l’actualité lyonnaise, cette semaine, sont des symboles éclatants de la transformation radicale que nous vivons depuis quelques années. L’un incite à pleurer, l’autre à se réjouir.
Ceux qui veulent pleurer s’enfonceront un peu plus dans le désespoir
en prenant l’exemple de la bijouterie Delatour, à Vénissieux. Ancienne star des gazettes, premier distributeur français de bijoux en grande surface dans les années 1990, sponsor d’une équipe du Tour de France… la société vénissianne va passer dans quelques jours devant le tribunal de Commerce de Lyon et vraisemblablement subir une liquidation judiciaire en bonne et due forme, laissant sur le carreau près de 174 salariés ( dont 50 au siège de Vénissieux).
Ce qui est particulièrement désespérant, ce sont les raisons qui ont été avancées aux salariés pour expliquer cette fermeture :
les 35 heures, la concurrence, la mondialisation… À ce train, autant tous se jeter par la fenêtre, car il y a raisonnablement peu de chances que la mondialisation ne cesse soudain. Je ne connais pas dans le détail le dossier du bijoutier de Vénissieux, mais on peut toutefois penser que des erreurs de design et de stratégie sont plutôt à l’origine de la situation.
Mais c’est tellement plus commode de masquer ses propres carences derrière de soi- disant évolutions conjoncturelles.
Marine Le Pen est une spécialiste du genre : catalyser la colère bien réelle des gens en fournissant des explications simplistes et bidons, un peu comme les dirigeants de Delatour l’ont fait avec les salariés ( la direction ne souhaitait pas répondre à nos questions mardi, lors du bouclage).
Heureusement, cette mutation accélérée de l’industrie,
et les secousses qui en résultent sur les entreprises, ne constitue pas la seule tendance forte qui marque la conjoncture. Il en existe bien d’autres qui redonnent de l’espoir. C’est le cas, voici quelques jours, de la reprise d’un bar- tabac, La Pipe, dans le 7e arrondissement, tel que l’a révélé notre site saladelyonnaise. com
Le rachat de ce bar- tabac a été intégralement fi nancé par une plate- forme web de prêts participatifs.
Ce sont donc des prêteurs anonymes qui ont apporté 810 000 euros sur le million d’euros nécessaire à la reprise. Il y a dix ans, ce dispositif dit de « crowdfunding » ( prêt par la foule) rendu possible par l’émergence des nouveaux services en ligne, n’aurait pas été possible.
C’est un levier extraordinaire pour l’emploi et l’entrepreneuriat.
Combien de projets délaissés par des banquiers frileux auraient- ils pu éclore et s’épanouir si le prêt participatif avait existé naguère ? De très nombreux, certainement. De quoi garder un peu d’optimisme, malgré la chute de Delatour.