- Christophe Sapet, l’inventeur surdoué
Bien moins médiatique que son compère de toujours Bruno Bonnell, Christophe Sapet n’en est pas moins un des dirigeants les plus inventifs de sa génération. D’abord pionnier du jeu vidéo et de l’Internet, ce « Steve Jobs lyonnais » récidive actuellement av
Le papa de la navette électrique sans chauffeur Navya,
c’est lui. À 58 ans, Christophe Sapet est en train de s’offrir une nouvelle success- story entrepreneuriale avec la commercialisation de ce minibus autonome à l’allure futuriste et bourré de capteurs. En test depuis septembre dernier dans le quartier de la Confluence, c’est peu dire que la navette Navya fait le buzz, entre une levée de fonds de 30 millions d’euros bouclée en octobre dernier, un partenariat avec le géant du transport Transdev et des articles de presse à la pelle qui consacrent ce véhicule du futur. Une vieille habitude pour son PDG. Avec son compère de toujours Bruno Bonnell ( qui occupe la présidence du conseil de surveillance chez Navya), Christophe Sapet affiche déjà un sacré palmarès : ensemble, ils ont cofondé à Lyon le
premier éditeur français de jeu vidéo Infogrames au début des années 1980, puis l’un des premiers fournisseurs d’accès à Internet français, Infonie, au milieu des années 1990. Les deux hommes se sont rencontrés en 1975 sur les bancs des classes préparatoires de La Martinière, pour ne plus se lâcher. Et, dès le départ, avec l’envie de créer des boîtes. « On avait 17 ans, et l’une de nos idées était de lancer une chaîne de fast- food. Un concept qui n’exis
tait pas encore » , rappelle Bruno Bonnell. Mais ils ne deviendront jamais les rois du burger, optant finalement pour les nouvelles technologies et les jeux vidéo. Entre les deux, les rôles sont vite définis. Au très habile communicant, Bruno Bonnell, la lumière pour vendre les produits. Le plus réservé, Chrisophe Sapet, est lui, le technicien et le gestionnaire de l’ombre. Celui que personne – ou presque – ne connaît et ça lui va bien. « Nous sommes un couple gagnant dans la mesure où on se fait confiance et on respecte le territoire de légitimité de l’autre. Notre tandem, c’est un peu “Amicalement vôtre” » , décrit Bruno Bonnell. Derrière son regard clair et son look discret de premier de la classe, Christophe Sapet, que l’on peut trouver « froid au premier
abord » selon un ami proche, est un inventeur boulimique, véritable défricheur d’innovations dont Navya est le dernier exemple. Pour l’instant, la petite navette lyonnaise a uniquement l’autorisation de circuler en circuit fermé : sur un vaste campus universitaire, un site industriel sensible ou bien encore une gigantesque usine. Mais, pas impossible de la voir un jour sur les routes. « Le potentiel est immense » , est persuadé Christophe Sapet.
Son job, la technique. L’homme n’est pas du genre à se vanter, mais il a réussi une véritable prouesse : développer ce véhicule autonome en un temps record, un an à
peine. « Tout a été très vite car je suis quelqu’un qui a une compréhension assez naturelle des nouvelles technologies. J’ai créé une navette autonome mais j’aurais aussi bien pu travailler sur un projet de coeur artificiel. L’aspect technologique a toujours été le plus important pour moi. Ça, c’est mon job » , dit- il. Au point que ses proches lui collent facilement l’étiquette de « surdoué » de la techno. Capable d’ingurgiter des informations aussi rapidement qu’il débite les mots lorsqu’il parle. Christophe Sapet a le don de comprendre les nouveaux sujets technos plus vite que tout le monde. « Il est capable de partir aux toilettes avec un bouquin technique de 200 pages et de le connaître par coeur en sortant ! » s’amuse Thomas Schmider, le troisième mousquetaire de l’aventure Infogrames. Qui poursuit : « Du coup, il a les bons et les mauvais côtés de quelqu’un qui a des convictions très fortes. Il est parfois un peu obstiné. Il a souvent raison… » Mais c’est aussi un ami
« Il est capable de partir aux toilettes avec un bouquin technique de 200 pages et de le connaître par coeur en sortant ! » , s’amuse un de ses proches »
facile, « on ne peut pas s’engueuler avec lui, embraye un autre de ses proches, c’est pour cela que son duo avec Bruno Bonnell fonctionne si bien. » On ajouterait que l’homme est du genre tout le temps pressé, avec un planning ultra- chargé fait de voyages aux quatre coins du monde pour développer sa pépite Navya. Après de nombreux échanges avec son service communication, il nous accorde une demi- heure d’interview, qui durera finalement le double. Avec un retour aux origines, et une enfance passée dans les ateliers du garage de son grandpère. « Il employait une centaine de personnes dans une concession Renault de Valence, dans la Drôme. C’était un chef d’entreprise visionnaire du XXe siècle. Il a vendu en 1968, j’avais 10 ans. J’ai sans doute un peu hérité de ce côté entrepreneur » , rapporte- t- il.
Compétition mondiale. Et, à l’approche de la soixantaine, Navya sonne comme un ultime défi pour ce « geek de la techno » qui garde le même enthousiasme et la même énergie qu’à ses 20 ans. « Avec Navya, nous sommes en compétition avec les plus grosses entreprises du monde » , dit- il avec gourmandise et ambition. Alors que la société emploie actuellement une centaine de salariés à Villeurbanne et Paris, Christophe Sapet prévoit d’ouvrir des sites de production à Chicago aux États- Unis et en Australie ( voir page suivante). Une soif de conquête mondiale. « Quand vous êtes aux manettes d’un projet comme Navya, il faut savoir faire preuve de ténacité. » Et c’est aussi une de ses qualités. Le patron, décrit avec un « carac
tère bien trempé » , n’a qu’une idée en tête : prendre de l’avance face