Point de vue de Sylvain Fornès,
SYLVAIN FORNÈS, PRÉSIDENT DE LA CAPEB RHÔNE Adoptée par la Région le 9 février, la clause Molière, qui veut imposer la langue française sur les chantiers pour lutter contre le travail détaché, est vue comme une discrimination par ses détracteurs. Pas pour
président de la Capeb Rhône : « la clause Molière, du bon sens pour les professionnels »
Pour la Capeb* Rhône, la clause Molière est
nécessaire. Déjà appliquée depuis 2008 dans le domaine maritime pour que les gens de mer et les salariés se comprennent, se coordonnent et appliquent les règles de sécurité, elle semble une évidence bien loin des débats politiciens actuels. Ceci n’implique pas nécessairement que chaque travailleur pris individuellement maîtrise parfaitement la langue française. Ce n’est en aucun cas une clause discriminatoire : la tradition du bâtiment d’intégrer des travailleurs étrangers ne devant évidemment pas être remise en cause. Mais il est indispensable que sur un même chantier les entreprises et les salariés s’entendent et suivent les règles en matière de santé et sécurité obligatoires en France.
Seul moyen de certifier de la qualité d’un ouvrage. La Capeb Rhône, l’organisation du bâtiment la plus puissante du département, a été la première à alerter les pouvoirs publics dès janvier 2015 sur le travail détaché. La clause Molière est, avant tout, essentielle pour la qualité des chantiers. Sinon comment être certain que les travailleurs détachés ont correctement suivi les nombreuses formations ( habilitation électrique, secouriste, CACES : conduite des engins, amiante…) imposées chaque année aux salariés français ? Comment faire jouer la garantie décennale lorsque les salariés ou l’entreprise ne dépendent pas de la juridiction française ? Pour nous, la clause Molière est aujourd’hui la seule solution pour garantir que les normes françaises, - les plus exigeantes d’Europe - ont bien été appliquées. Ceci permet en outre à une assurance de se retourner en cas de sinistre ou malfaçon.
C’est également la seule façon de protéger la santé et
la sécurité des salariés. Pour la Capeb Rhône, l’appel aux travailleurs détachés correspond uniquement à du dumping social. Le secteur du bâtiment est confronté depuis quatre ans à une baisse d’activité : il n’y a donc pas de pénurie de main- d’oeuvre comme par le passé. L’augmentation considérable des travailleurs détachés dans le bâtiment ne s’explique pas par un manque de main- d’oeuvre. D’ailleurs, les entreprises artisanales ne font pas appel à une maind’oeuvre étrangère low- cost. Avec la clause Molière, les salariés sont vraiment protégés et couverts par la législation du droit du travail.
La demande d’un nouveau dispositif. Notre attachement à la qualité et à la sécurité est toujours notre préoccupation majeure. C’est pourquoi la délégation du Parlement européen à Paris vient d’inviter la Capeb à une table ronde sur la révision de la Directive travailleurs détachés. Ceci nous a permis de rappeler nos positions. Nous demandons une durée de détachement par secteur d’activité de six mois maximum dans la construction. Nous proposons la suppression de toute répétitivité pour éviter que le travailleur détaché revienne quelques jours dans son pays d’origine, remette les compteurs à zéro, et reparte ainsi pour une nouvelle durée. Le contrôle des sociétés d’intérim doit également être étudié.
L’appui d’un cadre légal. Les entreprises sont confrontées à une concurrence déloyale et à un dumping social insoutenable. Ce sujet n’en est malheureusement qu’un parmi d’autres pour défendre la branche du bâtiment : la trop lente mise en place de la carte d’identification professionnelle, pourtant annoncée il y a près d’un an, en est un exemple. C’est pourquoi la Capeb demande qu’un salarié détaché présente une ancienneté d’au moins six mois dans son entreprise. Et la coordination des régimes européens de sécurité sociale doit être une priorité.