Purge cannoise
Un cinéaste en pleine crise
d’inspiration voit revenir un ancien amour qu’il croyait mort et ne sait plus qui il aime. Sur un thème rebattu qui aurait pu donner un film sentimental porté par un trio de comédiens qu’on aime, malheureusement, aussi brillant soit- il, Desplechin succombe au verbiage nombriliste : pas un mot prononcé qui ne conduise à une pluie de références ( à ses propres personnages, à Pollock, à Hitchcock, et on en passe), tuant dans l’oeuf l’émotion qui aurait pu sur- gir. Pire, un dialogue sur deux se termine en question ou en maxime foireuse sur la vie qui va mal : « Qu’est- ce que tu cherches à faire ? » ; « Quelle dose de souffrance tu souhaites ? » ; « Je n’en finissais pas de ne pas lui suffire » ; ou le pompon : « C’est pas facile d’être le suicide de quelqu’un » ( sic). Si l’on était sûr d’avoir compris, on dirait volontiers que c’est certain, surtout lorsque la plupart des arguties psychologico- sentimentales sont répétées trois fois, sans doute pour mieux marquer l’indécision d’ai- mer. On comprend mieux pourquoi le film a deux versions : celle remontée et amputée de 20 minutes pour Cannes ( comprenez, Marion Cotillard et Charlotte Gainsbourg ça fait une belle montée des marches, mais le film est vraiment trop chiant). C’est celle que vous pouvez voir en salles si vous en avez le courage. Et la « version originale » de 2 h 15, que préfère le réalisateur et qui est projetée dans une seule salle à Paris… celle appartenant au producteur du film, Pascal Caucheteux. Le comble de l’entre- soi. Décidément, ce Desplechin- là n’était pas fait pour le public. L. H.