Froide esthétique
Heureusement pour les cinéastes que les hommes de main d’Hitler étaient suffisamment nombreux et barbares pour continuer de les inspirer. Parfois à tort. Dans HHhH, film au titre aussi énigmatique que difficilement prononçable, le bourreau s’appelle Heydrich. Et il n’était pas du genre rigolo, puisqu’en plus d’avoir épuré les rangs du parti nazi et dirigé la Bohême- Moravie à coups de massacres, c’est l’architecte de la solution finale. Voilà qui aurait pu faire un bon sujet de film, mais que Cédric Jimenez se contente d’effleurer. Le réalisateur abandonne l’Histoire et la psychologie au profit de longs tableaux esthétisants, avec caméra virevoltante et musique solennelle, pour suggérer tour à tour la barbarie d’Heydrich et ses quelques moments d’humanité.
Superficiel C’est beau mais froid, et surtout épuisant. Jimenez peine à poser sa caméra gigoteuse pour créer une véritable dramaturgie, les scènes de dialogue étant expédiées et le contexte historique réduit à l’état d’indices. Et surtout, au lieu de creuser la personnalité d’Heydrich, le film abandonne soudainement ce personnage dans sa deuxième partie pour se consacrer à l’opération Anthropoid, une mission d’assassinat du dirigeant nazi orchestrée par Londres et confiée à deux soldats tchécoslovaques. Là, il retombe dans ses mêmes travers. Les deux personnages, réduits à l’état de figures historiques avec le minimum de psychologie, provoquent le minimum d’empathie chez le spectateur. On reste en surface de ce film, long comme l’Occupation.