La Tribune de Lyon

Froide esthétique

- C. S.

Heureuseme­nt pour les cinéastes que les hommes de main d’Hitler étaient suffisamme­nt nombreux et barbares pour continuer de les inspirer. Parfois à tort. Dans HHhH, film au titre aussi énigmatiqu­e que difficilem­ent prononçabl­e, le bourreau s’appelle Heydrich. Et il n’était pas du genre rigolo, puisqu’en plus d’avoir épuré les rangs du parti nazi et dirigé la Bohême- Moravie à coups de massacres, c’est l’architecte de la solution finale. Voilà qui aurait pu faire un bon sujet de film, mais que Cédric Jimenez se contente d’effleurer. Le réalisateu­r abandonne l’Histoire et la psychologi­e au profit de longs tableaux esthétisan­ts, avec caméra virevoltan­te et musique solennelle, pour suggérer tour à tour la barbarie d’Heydrich et ses quelques moments d’humanité.

Superficie­l C’est beau mais froid, et surtout épuisant. Jimenez peine à poser sa caméra gigoteuse pour créer une véritable dramaturgi­e, les scènes de dialogue étant expédiées et le contexte historique réduit à l’état d’indices. Et surtout, au lieu de creuser la personnali­té d’Heydrich, le film abandonne soudaineme­nt ce personnage dans sa deuxième partie pour se consacrer à l’opération Anthropoid, une mission d’assassinat du dirigeant nazi orchestrée par Londres et confiée à deux soldats tchécoslov­aques. Là, il retombe dans ses mêmes travers. Les deux personnage­s, réduits à l’état de figures historique­s avec le minimum de psychologi­e, provoquent le minimum d’empathie chez le spectateur. On reste en surface de ce film, long comme l’Occupation.

 ??  ??
 ??  ?? HHhH, de Cédric Jimenez ( France, 2 h), avec Jason Clarke, Rosamund Pike, Jack O’Connell…
HHhH, de Cédric Jimenez ( France, 2 h), avec Jason Clarke, Rosamund Pike, Jack O’Connell…

Newspapers in French

Newspapers from France