Un assassinat qui coûte cher
Le 24 juin 1894, le président Sadi Carnot, venu à Lyon pour inaugurer l’Exposition Universelle, est assassiné dans la rue de la République, par l’anarchiste italien Sante Caserio. L’histoire est connue, et une plaque commémorative, ainsi qu’une dalle rouge dans la rue ( au niveau de la chambre de Commerce) marquent l’endroit exact de l’assassinat. Ce que l’on sait moins, c’est que l’événement a été suivi de mouvements de foule et de manifestations contre les Italiens de Lyon. Dans toute la ville, des groupes aux slogans hostiles – « Vive Carnot ! À bas les Italiens ! » –, drapeaux français en évidence, attaquent les principaux commerces italiens. Parmi eux, le restaurant Casati au 21 de la rue de la République, à deux pas du palais de la Bourse. Il est alors l’adresse incontournable du tout Lyon, depuis près de 40 ans. Intellectuels en vue, bourgeois et ce qu’il reste d’aristocratie s’y croisent tous les jours. Bismarck et le futur roi du Royaume- Uni, Édouard VII ont, dit- on, déjà goûté au célèbre chocolat chaud de l’adresse. Mais la réputation du Casati ne pèsera pas lourd face à l’état de tension qui règne à Lyon. À 23 heures, le jour de l’assassinat de Sadi Carnot, éclate une altercation entre un consommateur et un garçon de café d’origine italienne. Les esprits s’échauffent, une foule fi nit par se rassembler devant le restaurant, principalement composée d’étudiants des cercles catholiques. Ceux- ci fi nissent par pénétrer dans l’établissement et le dévastent méthodiquement. Glaces brisées, tables et chaises réduites en morceaux, bouteilles éclatées… L’événement sera repris dans les médias nationaux. Le restaurant Casati, lui, ne s’en remettra pas. L’étendard de la rue de la République n’aura pas survécu à l’assassinat du président.