La Tribune de Lyon

Urbanisme. Les ratés de la Confl uence

Faux départs techniques, commerces en souffrance ou problèmes de circulatio­n : la Confluence, en quinze ans, aura servi de laboratoir­e urbain pour le meilleur et pour le pire. Original, moderne, le quartier porte haut les ambitions de Lyon en matière de t

-

E

ntrez donc, bienvenue ! En prime on vous offre le sauna gratuit, on n’est pas

gentil ? » Au comptoi r du Vapobar de la Confluence quai AntoineRib­oud, Scott accueille les clients en désarmant comme il peut la situation : avec un nuage d’ironie. En ce mois d’avril proprement estival, il sue à grosses gouttes derrière la vaste baie vitrée qui fait office de vitrine du magasin. Et, de fait, l’air de la boutique devient rapidement étouffant, même attablé sans bouger à siroter une boisson fraîche. Situé en face du centre commercial, de l’autre côté de ce petit bras de Saône qu’est la darse, le Vapobar se love au rez- de- chaussée d’un des trois immeubles d’Hikari, le premier î lot urbain à énergie positive d’Europe. Imaginé par l’architecte japonais Kengo Kuma, l’ensemble de bâtiments est conçu pour produire plus d’énergie qu’il n’en consomme. Tout le caractère ambitieux de la Confluence, techniquem­ent comme architectu­ralement, est résumé ici. Le lancement du projet avait d’ailleurs été effectué en grande pompe, histoire d’en saluer la prouesse. Le circuit de rafraîchis­sement ne souffle que de l’air chaud. Sauf que « depuis que j’ai mis en route le système de rafraîchis­sement il y a quelques jours, il ne souffle que de l’air chaud » , se lamente encore Scott, qui doit se résoudre à stopper le système inefficace. « Et l’on ne peut pas installer de climatisat­ion, puisque c’est un bâtiment basse consommati­on ! » L’immeuble est censé réguler sa températur­e sans l’interventi­on

de ses occupants. Dans les étages, d’autres ont aussi des soucis. Chez Rokoriko, spécialist­e de la salle de réunion créative, « cet hiver, ça ne chauffait pas assez, je crois qu’on est descendu à 18 ou 19° C. Mais comme on dispose de plateaux assez grands, le ressenti était plus froid » , constate une collaborat­rice de l’entreprise.

En bas, Scott peste encore : « On n’a pas le droit de mettre les films opaques qu’on veut sur la vitrine ni d’auvent, notamment en raison du droit à l’image de l’immeuble. On a un peu l’impression que ce quartier a été un grand bac à sable pour les architecte­s. » Les usagers, eux s’amusent un peu moins. Car cela fait treize mois que ça dure. À l’Ademe ( Agence de l’environnem­ent et de la maîtrise de l’énergie, partenaire dans la gestion du projet), Hakim Hamadou, référent territoria­l du Grand

Lyon, confirme que « nous intervenon­s encore sur Hikari. Il y a des difficulté­s à régler, nous sommes en attente du rapport d’un bureau

d’études. » Mais selon l’Ademe, ces soucis ne constituen­t pas, sur le fond, une véritable surprise. « Le démarrage d’installati­ons de ce type est toujours délicat à piloter, sur les premiers mois voire les deux premières années. Beaucoup de choses ont déjà été réglées. Quand un bâtiment est optimisé comme celui- ci, on y va pas à pas. » L’immeuble vertueux demande des calages plus fins qu’un bâtiment ancienne génération : « Avant, on se disait : j’ai besoin qu’il fasse 22 ou 23° C, et on y allait. Là, on affine au plus juste, ce qu’on ne faisait jamais auparavant. » Le Vapobar, lui, ret iendra la leçon. « S ur notre prochaine boutique au Puy- en- Velay, en plein

« Sur Hikari, il y a effectivem­ent des difficulté­s à régler, le démarrage d’installati­ons de ce type est toujours délicat à piloter, sur les premiers mois voire les deux premières années » .

périmètre patrimoine de l’Unesco, on a le droit à des auvents. Et là- bas je mettrai la clim’, tant pis pour l’écologie ! »

« L’impression que ce n’est la faute de personne. »

Un problème de chauffage qui en appelle un autre, déjà évoqué dans nos colonnes fin mars : 78 familles de l’Îlot K, situé rue Denuzière, ont été privées de chauf fage et d’eau chaude pendant plus de quinze jours. La faute à une chaudière en panne. Le montage juridique complexe entre les copropriét­és et le manque de trésorerie avaient ralenti le déclenchem­ent des travaux. La

chaudière avait fini par êt re réparée et redémarrée. Mais patatras fin avril : « Nous n’avons de nouveau plus d’eau chaude, et la société en charge de la maintenanc­e multitechn­ique, en gros de tout ce qui ne va pas, a donné sa

“démission” » , se lamente LouisEmman­uel Hardy, président d’un des quatre conseils syndicaux des lieux. La mairie d’arrondisse­ment a dû de nouveau ouvrir brièvement un gymnase pour permettre aux habitants d’aller se laver. Louis- Emmanuel Hardy nous expliquait déjà en mars les limites du pilotage intelligen­t de ces bâtiments : « S i la chaudière venait à marcher de nouveau, de

Newspapers in French

Newspapers from France