Mon déjeuner avec Hervé de Gaudemar
Méfiez- vous des juristes aux airs de premier de la classe ! Le vernis peut cacher de redoutables
passions et engagements. C’est le cas du doyen de la faculté de droit de Lyon 3, institution lyonnaise que beaucoup d’autres métropoles nous envient. Cela ne se voit pas tout de suite, mais Hervé de Gaudemar est un passionné d’enseignement et un professeur diablement engagé. Il souhaitait d’ailleurs que le déjeuner se tienne à l’Institut de formation Paul Bocuse, place Bellecour, pour le symbole. L’affluence dans l’établissement en a décidé autrement. Dans un monde universitaire souvent marqué par les petits arrangements et les compromis peu glorieux, Hervé de Gaudemar détonne. Il défend, sans crainte de se mettre à dos une bonne partie de la communauté enseignante, son modèle d’université. Il regrette le temps d’avant 68, quand les facultés avaient un grand pouvoir. Depuis, selon lui, la « bureaucratie » a pris le pouvoir, altérant la liberté des enseignants.
À la même table. Et, dans le contexte actuel de réorganisation tous azimuts des universités, il craint que ce modèle centralisé ne se renforce encore, en tuant toute initiative. Il n’hésite pas à mettre en cause les « hautes sphères » pour parvenir à ses fins. Jusqu’à son président, qu’il interpelle en des termes choisis : « L’université doit s’occuper des moyens généraux ; la faculté de la pédagogie et de l’enseignement. » Quant à la réputation élitiste du droit à Lyon 3, il balaye la critique d’un revers de manche. Ce Marseillais passé par Assas ( Paris 2), est avant tout un militant de l’école républicaine et on le sent allergique à toute idée de privilège. Il a bien conscience que sa faculté accueille des gens « bien nés » , mais son but revendiqué est de faire asseoir à la même table, par la vertu du droit, « le fils du notaire et le fils du concierge. » F. S.