La Tribune de Lyon

HERVÉ DE GAUDEMAR Le projet d’Idex va- t- il dans le bon sens, selon vous ?

- « L’existence de deux facultés de droit à Lyon est très regrettabl­e. »

Si on se dirige vers davantage de centralisa­tion, on va tuer l’université française. Le projet de créer de grandes université­s à dimension internatio­nale est porteur à la fois d’espérance et de cauchemars. Mon rêve, c’est que, si l’université de Lyon se construit, elle le soit sur les bases de ses facultés. Sinon, elle va devenir un mastodonte de bureaucrat­ie et de centralisa­tion et ce sera la mort de la faculté de droit de Lyon.

Rien ne laisse penser que la balance va pencher dans un sens plutôt que l’autre ?

Mon rêve est de retrouver l’essence du modèle facultaire d’avant 1968. L’université peut garder certains pouvoirs de contrôle ou disciplina­ires, mais elle doit surtout être un facilitate­ur d’actions communes entre les différente­s facultés, qui doivent conserver la pédagogie et le budget.

Quel est le calendrier ?

Les décisions vont se prendre très vite, pour une mise en oeuvre au 1er janvier 2020. Je souhaite donc avoir très rapidement des assurances sur le modèle qui se construit. Mais, dans le contexte actuel, le doyen de la faculté de droit n’est pas l’interlocut­eur naturel de ceux qui décident le projet. A priori, nous avons une vision commune avec le président de Lyon 3 sur la philosophi­e de la future université de Lyon. Il a parfaiteme­nt conscience de la force de son université dans un contexte réglementa­ire hostile. Mais quelle est sa vraie marge de manoeuvre vis à vis des autres présidents d’université­s lyonnais ? Je n’en ai aucune idée…

Avez- vous les ressources suffisante­s pour exercer votre mission ?

Pour offrir le mei l leur enseigneme­nt, l’enjeu financier est également capital. Nous n’avons pas, aujourd’hui, les moyens correspond­ants à notre mission. Notre budget est de trois millions d’euros et présente une jolie particular­ité : il est alimenté à 80 % par des recettes propres. Nous avons donc la marge financière pour recruter des contractue­ls et des administra­tifs, alors que l’université Lyon 3 est l’une des moins bien dotées de France, juste après Mayotte. Aujourd’hui, nous aurions besoin de recruter pour alléger les TD et développer de nouveaux projets, mais nous sommes contraints par les règles de l’État qui nous empêchent d’embaucher, même des vacataires.

Cette forme d’autonomie est- elle à l’origine de l’image très élitiste de Lyon 3 ?

Je n’ignore pas cette réputation, et elle n’est pas fausse pour certains étudiants bien nés. En revanche, qualifier la faculté de droit d’établissem­ent de « fils à papa » , c’est totalement mensonger et faux, car nous avons une très forte vocation sociale et nous accueillon­s tous les étudiants chez nous, quelle que soit leur origine. L’exemple d’André Soulier, qui est issu de nos rangs, est édifiant à ce titre : ce fils d’un chauffeur de taxi qui est passé par notre faculté est devenu l’un des plus grands avocats lyonnais… C’est une vocation sociale qui m’anime et qui anime cette faculté de droit.

Lyon 2 s’embrase contre Parcoursup, pas Lyon 3. Pourquoi ?

Chez nous, les étudiants n’ont pas bloqué l’université, ni manifesté d’hostilité particuliè­re à l’égard de Parcoursup. Mon prédécesse­ur Franck Marmoz a pris une position de principe forte avec APB, celle de ne pas pratiquer de tirage au sort, qui est un système qui me révulse. Le mérite est un critère de sélection moins injuste. Mais la meilleure des solutions est de donner plus de moyens aux université­s pour pouvoir accueillir tous les étudiants. Parcoursup n’est peut- être pas la méthode la plus pertinente, mais elle poursuit de très bons objectifs, tels que supprimer le tirage au sort. En licence en droit, nous avons reçu 13 000 voeux cette année.

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