L’édito d’Antoine Comte
Les Nuits de Fourvière réservent toujours leur lot de surprises.
Mais vendredi soir dernier, pour le concert grandiose de Bernard Lavilliers et ultime grand show de cette édition particulièrement réussie ( 150 000 spectateurs cette année encore), c’est plus du côté du public qu’il fallait laisser traîner les oreilles. Notamment au dernier rang réservé pour les peoples lyonnais comme Laurent Gerra et Thierry Frémaux, mais surtout pour les huiles de la Métropole de Lyon, le principal financeur du festival.
Parmi les élus présents pour cette dernière sortie publique avant les vacances :
de nombreuses figures du macronisme lyonnais comme le président de la collectivité lyonnaise David Kimelfeld ou encore Hubert JulienLaferrière, le député LReM de la 2e circonscription du Rhône. On ne doute pas que ces derniers puissent être fans du colosse virevoltant de SaintÉtienne, loin de là. Mais avouez que leur présence au concert du chanteur au discours social le plus rodé du pays est quand même cocasse. Comment ces élus qui défendent une politique libérale que la droite de Nicolas Sarkozy n’a jamais osé mettre en oeuvre, peuvent se déhancher et applaudir sans aucune espèce de pudeur un artiste qui a construit sa carrière sur des tubes diffusés en boucle dans les manifs de la CGT ou à la Fête de l’Huma.
Durant le concert, on a d’ailleurs très vite senti deux mondes qui s’opposaient.
D’un côté, les vrais fans touchés directement dans leur chair de citoyen de gauche par un Lavilliers qui n’a même pas eu besoin d’en rajouter tellement le message hostile au gouvernement était limpide. Et de l’autre, d’anciens élus socialistes devenus macronistes, forcément pas très à l’aise dans leurs baskets, même s’ils ne laissaient rien transparaître. Une certitude : on n’aurait en tout cas pas aimé être à leur place quand le roi de la salsa à la française a enchaîné les morceaux lourds de sens comme Traffic, Bon pour la casse ou encore
Croisières méditerranéennes et son refrain visant directement la politique migratoire de Gérard Collomb. « Croisières méditerranéennes. Sourires carnassiers des murènes. Très loin des sirènes italiennes. Tu atteindras ces rives sombres très près des côtes siciliennes. Les vierges noires comme une traîne. Imaginer la mer. Qu’on a payée si cher. Imaginer la mer… »