Urbanisme.
Changement climatique : à quoi ressemblera Lyon en 2050
Lyon est aujourd’hui l’équivalent climatique de Montpellier il y a 30 ans. Entre 2050 et 2100, la capitale des Gaules connaîtra les mêmes températures qu’à Madrid et Alger. Les jours de canicule augmenteront encore et les précipitations devraient continuer de s’espacer dans le temps tout en étant plus violentes. Face à ce scénario noir, comment la ville, sa faune, sa flore ou encore ses usages vont- ils être bouleversés ? Quelles solutions seront mises en place pour amortir le choc ? Tribune de Lyon se projette dans l’avenir et tente de dessiner Lyon, la Méditerranéenne.
Pour les Lyonnais qui ont souffert de l’un des plus longs épisodes de canicule estivale, les rêves de Bruno Charles font plutôt envie. Le chargé du Plan climat de la Métropole de Lyon n’hésite pas à voir jusqu’en 2050
et même au- delà. « Il faut prendre un virage intellectuel, imaginer la ville nature. On a déjà comme objectif d’augmenter la canopée sur la voirie de 13 à 22 % d’ici 2030. Pourquoi ne pas penser des sousbois urbains avec des micocouliers, des cerisiers du Japon ? La rue de la République et la rue ÉdouardHerriot peuvent très bien en effet accueillir des arbres. Et pourquoi pas une forêt nourricière avec des arbres fruitiers ? Il faut aussi faire revenir l’eau à des endroits où elle a été recouverte. Il existait auparavant de petits ruisseaux en ville, par exemple à la Part- Dieu où il y a d’ailleurs une rue de la Rize. Or la Rize, c’est un cours d’eau ! » Mais avant que Lyon ne devienne un équivalent urbain de la Comté des Hobbits, il va couler de l’eau sous le bitume. « Les arbres, ça prend du temps, c’est au- delà de 2050 » , concède l’élu de la CroixRousse. Avant cela, il y a d’autres étapes pour aboutir à un « rafraîchissement » de la ville. « Nous sommes dans les prémices » , glisse- t- il.
« Dépétroliser » nos modes de vie.
Le Plan climat a déjà permis d’engager des act ions pour amort i r le choc du thermomèt re. Comme l’arrosage intelligent qui fonctionne grâce à des capteurs installés dans les arbres et connectés à des bassins de rétention. En test rue Garibaldi ( Lyon 3e), cette innovation est destinée à être généralisée dans toute la ville. Face aux îlots de chaleur, la collectivité lyonnaise a aussi créé des « parcours fraîcheur » et uti lise un nouveau revêtement de trottoirs en béton de couleur claire, qui chauffe moins en cas de canicule. Des arbres plus résistants à la sécheresse et à la chaleur, plus « couvrants » sont également plantés chaque année. Le Grand Lyon lancera même en avril 2019 une centrale de production de froid à la Part- Dieu, qui réutilisera les eaux des parkings de la ville pour la climatisation. La chaufferie biomasse écologique verra, elle, le jour en mars 2019. Les sols sont également petit à petit désimperméabilisés pour permettre à l’eau de pluie de s’infiltrer plus aisément. Mais lutter contre le réchauffement climatique, c’est aussi la fraîcheur intérieure et l’isolation thermique : « À la fin du mandat,
nous aurons isolé 18 000 logements, reprend Bruno Charles. Avec des résultats intéressants : sur l’effet de serre, nous avons réduit les émissions de 16 % alors que la population a augmenté de 13 % depuis le début du Plan climat. Pour l’objectif 20 % en 2020, nous sommes pas mal partis. Il faut continuer à décarboner, “dépétroliser” nos modes de vie. C’est à partir de 2020- 2030 que vont s’amorcer les vraies ruptures. » Notamment dans le bâtiment, le transport, et l’urbanisme en général. Smart buildings et toits végétalisés. Dans l’habitat justement, les
smart buildings, connectés, intelligents, passifs, permettront aux nouvelles constructions d’être plus efficaces et économes. Alors pourquoi ne pas placer Lyon à la pointe du… courant continu ? C’est le souhait d’Emmanuel François, le président lyonnais de l’alliance des professionnels du bâtiment intelligent, la SBA ( Smart buildings alliance). Ce dernier verrait bien Lumen, le futur bâtiment de la filière Lumière à la Confluence, branché sur courant continu.
« Cela permet une économie de consommation de 20 à 25 %. C’est aujourd’hui l’an zéro du courant continu. J’en ai parlé à la
Métropole » , explique- t- il. Cette technologie permettrait d’anticiper l’avènement des véhicules autonomes équipés de batteries suffisamment performantes pour servir à alimenter les maisons. En revanche, la solution éolienne ne semble pas promise à un grand avenir pour Lyon intra- muros : le « gisement » de vent y est insuffisant. Autre évolution qui pourrait prochainement concerner les bât iments lyonnais : les toitures végétal isées. Les nouvel les construct ions doivent présenter un taux de végétalisation de 30 %, selon le PLU de la Métropole. « Pendant la canicule, le “cagnard” peut atteindre les 60, 70 degrés sur un toit. Végétalisé, la température tombe à 15 degrés. Or, Lyon compte 700 hectares de toitures, soit sept fois le parc de la Tête d’Or » , lance encore Bruno Charles, qui garde malgré tout les pieds sur terre. Les nouveaux bâtiments qui sortent chaque année ne représentent jamais que 1 % du parc immobilier. Et végétaliser l’existant est moins facile : beaucoup de bâtiments sont privés et il n’est pas aisé d’imposer une végétalisation de bâtiments historiques comme à la Croix- Rousse ou dans le centre- ville. « Mais les toits et les murs végétalisés sont bien inscrits dans le Plan climat. Reste encore à déterminer comment, et de quelle ampleur » , précise l’élu du Grand Lyon. Si l’avenir est donc à moins de déplacements et plus de verdure, Lyon pourrait voir aussi pousser des jardins et des potagers partagés sur ses toits. Des entreprises comme Sous les Fraises s’y attellent. Celle- ci installe en effet des jardins potagers et fruitiers, comme cela a été fait cet été sur la toiture du supermarché Auchan à Caluire-et-Cuire. Originalité du process, les végétaux prospèrent