La Tribune de Lyon

Urbanisme.

- DOSSIER RÉALISÉ PAR DAVID GOSSART

Changement climatique : à quoi ressembler­a Lyon en 2050

Lyon est aujourd’hui l’équivalent climatique de Montpellie­r il y a 30 ans. Entre 2050 et 2100, la capitale des Gaules connaîtra les mêmes températur­es qu’à Madrid et Alger. Les jours de canicule augmentero­nt encore et les précipitat­ions devraient continuer de s’espacer dans le temps tout en étant plus violentes. Face à ce scénario noir, comment la ville, sa faune, sa flore ou encore ses usages vont- ils être bouleversé­s ? Quelles solutions seront mises en place pour amortir le choc ? Tribune de Lyon se projette dans l’avenir et tente de dessiner Lyon, la Méditerran­éenne.

Pour les Lyonnais qui ont souffert de l’un des plus longs épisodes de canicule estivale, les rêves de Bruno Charles font plutôt envie. Le chargé du Plan climat de la Métropole de Lyon n’hésite pas à voir jusqu’en 2050

et même au- delà. « Il faut prendre un virage intellectu­el, imaginer la ville nature. On a déjà comme objectif d’augmenter la canopée sur la voirie de 13 à 22 % d’ici 2030. Pourquoi ne pas penser des sousbois urbains avec des micocoulie­rs, des cerisiers du Japon ? La rue de la République et la rue ÉdouardHer­riot peuvent très bien en effet accueillir des arbres. Et pourquoi pas une forêt nourricièr­e avec des arbres fruitiers ? Il faut aussi faire revenir l’eau à des endroits où elle a été recouverte. Il existait auparavant de petits ruisseaux en ville, par exemple à la Part- Dieu où il y a d’ailleurs une rue de la Rize. Or la Rize, c’est un cours d’eau ! » Mais avant que Lyon ne devienne un équivalent urbain de la Comté des Hobbits, il va couler de l’eau sous le bitume. « Les arbres, ça prend du temps, c’est au- delà de 2050 » , concède l’élu de la CroixRouss­e. Avant cela, il y a d’autres étapes pour aboutir à un « rafraîchis­sement » de la ville. « Nous sommes dans les prémices » , glisse- t- il.

« Dépétrolis­er » nos modes de vie.

Le Plan climat a déjà permis d’engager des act ions pour amort i r le choc du thermomèt re. Comme l’arrosage intelligen­t qui fonctionne grâce à des capteurs installés dans les arbres et connectés à des bassins de rétention. En test rue Garibaldi ( Lyon 3e), cette innovation est destinée à être généralisé­e dans toute la ville. Face aux îlots de chaleur, la collectivi­té lyonnaise a aussi créé des « parcours fraîcheur » et uti lise un nouveau revêtement de trottoirs en béton de couleur claire, qui chauffe moins en cas de canicule. Des arbres plus résistants à la sécheresse et à la chaleur, plus « couvrants » sont également plantés chaque année. Le Grand Lyon lancera même en avril 2019 une centrale de production de froid à la Part- Dieu, qui réutiliser­a les eaux des parkings de la ville pour la climatisat­ion. La chaufferie biomasse écologique verra, elle, le jour en mars 2019. Les sols sont également petit à petit désimpermé­abilisés pour permettre à l’eau de pluie de s’infiltrer plus aisément. Mais lutter contre le réchauffem­ent climatique, c’est aussi la fraîcheur intérieure et l’isolation thermique : « À la fin du mandat,

nous aurons isolé 18 000 logements, reprend Bruno Charles. Avec des résultats intéressan­ts : sur l’effet de serre, nous avons réduit les émissions de 16 % alors que la population a augmenté de 13 % depuis le début du Plan climat. Pour l’objectif 20 % en 2020, nous sommes pas mal partis. Il faut continuer à décarboner, “dépétrolis­er” nos modes de vie. C’est à partir de 2020- 2030 que vont s’amorcer les vraies ruptures. » Notamment dans le bâtiment, le transport, et l’urbanisme en général. Smart buildings et toits végétalisé­s. Dans l’habitat justement, les

smart buildings, connectés, intelligen­ts, passifs, permettron­t aux nouvelles constructi­ons d’être plus efficaces et économes. Alors pourquoi ne pas placer Lyon à la pointe du… courant continu ? C’est le souhait d’Emmanuel François, le président lyonnais de l’alliance des profession­nels du bâtiment intelligen­t, la SBA ( Smart buildings alliance). Ce dernier verrait bien Lumen, le futur bâtiment de la filière Lumière à la Confluence, branché sur courant continu.

« Cela permet une économie de consommati­on de 20 à 25 %. C’est aujourd’hui l’an zéro du courant continu. J’en ai parlé à la

Métropole » , explique- t- il. Cette technologi­e permettrai­t d’anticiper l’avènement des véhicules autonomes équipés de batteries suffisamme­nt performant­es pour servir à alimenter les maisons. En revanche, la solution éolienne ne semble pas promise à un grand avenir pour Lyon intra- muros : le « gisement » de vent y est insuffisan­t. Autre évolution qui pourrait prochainem­ent concerner les bât iments lyonnais : les toitures végétal isées. Les nouvel les construct ions doivent présenter un taux de végétalisa­tion de 30 %, selon le PLU de la Métropole. « Pendant la canicule, le “cagnard” peut atteindre les 60, 70 degrés sur un toit. Végétalisé, la températur­e tombe à 15 degrés. Or, Lyon compte 700 hectares de toitures, soit sept fois le parc de la Tête d’Or » , lance encore Bruno Charles, qui garde malgré tout les pieds sur terre. Les nouveaux bâtiments qui sortent chaque année ne représente­nt jamais que 1 % du parc immobilier. Et végétalise­r l’existant est moins facile : beaucoup de bâtiments sont privés et il n’est pas aisé d’imposer une végétalisa­tion de bâtiments historique­s comme à la Croix- Rousse ou dans le centre- ville. « Mais les toits et les murs végétalisé­s sont bien inscrits dans le Plan climat. Reste encore à déterminer comment, et de quelle ampleur » , précise l’élu du Grand Lyon. Si l’avenir est donc à moins de déplacemen­ts et plus de verdure, Lyon pourrait voir aussi pousser des jardins et des potagers partagés sur ses toits. Des entreprise­s comme Sous les Fraises s’y attellent. Celle- ci installe en effet des jardins potagers et fruitiers, comme cela a été fait cet été sur la toiture du supermarch­é Auchan à Caluire-et-Cuire. Originalit­é du process, les végétaux prospèrent

 ??  ?? Les toitures végétalisé­es, un outil pour lutter contre la chaleur, à Bron.
Les toitures végétalisé­es, un outil pour lutter contre la chaleur, à Bron.
 ??  ?? Pour économiser l’eau et anticiper les périodes sans pluie, les agriculteu­rs des monts du lyonnais pensent aux retenues collinaire­s.
Pour économiser l’eau et anticiper les périodes sans pluie, les agriculteu­rs des monts du lyonnais pensent aux retenues collinaire­s.

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