La Tribune de Lyon

FLORENCE PORCEL

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Mars. Il a donc décidé de monter sa propre mission. Au final, je ne pense pas que le projet se réalisera car je ne suis pas certaine que les financemen­ts nécessaire­s seront rassemblés. J’en ai toujours été consciente, mais cela n’avait pas d’importance. Cette expérience m’a permis de me poser plusieurs questions comme « Qu’est- ce qu’être humain ? » C’est compliqué de comprendre quelque chose quand on est soi- même cette chose. J’ai aussi vraiment compris que l’on vit dans un écosystème et que l’on a besoin des plantes, des bactéries, des animaux. On ne peut pas vivre dans un endroit sans reproduire cet écosystème terrestre. L’Humain est complèteme­nt dépendant de ce qu’il y a autour de lui. Il ne faut pas que l’on se voit extérieur à notre environnem­ent. Malheureus­ement, c’est la vision que l’on a aujourd’hui.

Vous avez un regard assez sévère sur l’Homme et sur l’avenir de la Terre…

Oui, je suis très pessimiste. Les décisions à prendre pour inverser le cours des choses ne seront jamais prises à temps. Donc on peut dire que c’est trop tard. Mars n’est pas un plan B. On peut y installer une base scientifiq­ue permanente, mais je ne pense pas qu’y aller en nombre soit une option. D’un point de vue éthique, on ne doit pas saloper une planète qui n’est pas à nous. Nous n’avons que la Terre. La Terre se fout de l’Humanité. Nous en revanche, on est mal partis. Je pense pourtant qu’en tant que seule espèce intelligen­te et technologi­que connue, l’être humain a le devoir de se préserver lui- même. Aujourd’hui, on se suicide. On est idiot !

Pensez- vous qu’il existe des formes de vies extraterre­stres ?

Au fur à mesure des exploratio­ns spatiales, on se rend compte que l’on trouve des bribes de vie sur des comètes. On avance, mais on n’a pas encore de réponse précise. Pour ma part, je pense qu’il y a de la vie partout, ça grouille ! Je ne parle pas forcément de civilisati­ons, mais plutôt de végétaux ou de bactéries. C’est plus difficile de concevoir qu’il existe une civilisati­on technologi­que comme la nôtre. Si l’univers est infini, forcément, ça existe. Mais ça, on ne sait pas.

Vous savez que vous n’irez pas sur Mars… Visez- vous autre chose ?

J’aimerais aller sur la Lune. Il n’est pas exclu que ce soit possible quand je serai vieille. Si la possibilit­é s’ouvre un jour d’envoyer des personnes non- astronaute­s entraînées, je serais la première à postuler. En tout cas, je fais tout pour m’y préparer. Je constitue, par exemple, un dossier pour aller en Antarctiqu­e sur la base franco- italienne scientifiq­ue Concordia. C’est l’endroit le plus extrême que l’on puisse trouver sur Terre. Mon but, à terme, est d’y faire un hivernage. À cette période de l’année, il fait nuit et on ne peut pas sortir du continent. C’est donc bien plus dangereux que d’aller dans la station spatiale internatio­nale où, en cas de problème, les astronaute­s peuvent revenir sur Terre. À Concordia, pendant six mois d’hiver, on est livré à soi- même.

La vidéo la plus vue sur votre chaîne YouTube ne parle pas de cosmologie mais de la tumeur au cerveau que vous avez eue à 16 ans. Quel a été l’impact de cette épreuve dans votre vie ?

Toutes les personnes qui ont frôlé la mort vous le diront : ça change tout. On prend conscience de la fragilité de la vie. On sait que tout peut s’arrêter du jour au lendemain, n’importe quand. Vraiment. Alors quand on a envie de réaliser quelque chose, on le fait maintenant, sans attendre demain. Sans cette épreuve, j’aurais certaineme­nt été beaucoup plus timide dans mes choix. Je sais à quel point le temps est précieux et je ne veux pas m’emmerder à faire des trucs chiants. Il ne faut pas être sur son lit de mort avec des regrets. Voilà ce que ça a changé : je vis désormais avec le sentiment qu’il n’y a plus de temps à perdre. »

* Le projet Mars One ambitionna­it d’envoyer des humains s’installer dans un module d’habitation sur la planète rouge, sans retour. L’entreprise rattachée au projet vient de faire faillite.

« On vit dans un univers que l’on ne comprend pas à 95 %. Il y a des gens que cela angoisse. Moi, ça me fascine. »

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